Mot du président
Mot du président
Chers et chères Congressistes,
C’est avec beaucoup de fierté que je vous souhaite à toutes et à tous la bienvenue à l’Université Laval pour l’édition 2023 du Congrès annuel de la Société québécoise de science politique. Je me réjouis particulièrement du fait qu’il s’agit d’un retour tant attendu sur le campus après un hiatus de quatre longues années.
La thématique choisie pour l’édition 2023 — La négociation politique : un art en perte de vitesse ? — apporte un questionnement fondamental que plusieurs d’entre vous aborderont, à n’en pas douter, avec grand enthousiasme. En cette période où les positions politiques sont polarisées et polarisantes, la négociation constitue un élément central de l’activité politique. L’apport des politologues à sa compréhension est non seulement nécessaire, mais elle relève également d’un certain sentiment d’urgence. Le congrès 2023 de la SQSP cherchera donc à approfondir la question de la négociation comme processus politique.
Alors que l’on se questionne sur l’apport du français à la recherche scientifique, je me réjouis de vous voir toujours nombreux à présenter la fine pointe des travaux en science politique dans le cadre de notre congrès. La bataille est loin d’être gagnée, mais la rumeur de la mort de la recherche francophone dans notre champ d’études est grandement exagérée !
Je vous avouerai candidement que l’organisation du congrès ne s’est pas effectuée sans heurts et rebondissements. J’ai eu l’occasion de discuter avec d’autres collègues qui ont eu la lourde tâche d’organiser des colloques et des congrès nationaux et internationaux. Ils ont tous noté un manque de ferveur de la part des congressistes à la sortie d’une trop longue trêve pandémique. Le Conseil d’administration a considéré différents scénarios, incluant le retour à un Congrès virtuel, un report à l’automne 2023, ou même une annulation pure et simple. Nous avons persisté, en conservant à l’esprit qu’il était essentiel d’effectuer un certain retour « à la normale. » Demeurons positifs ! Les prochains congrès de la SQSP seront sûrement des calques heureux des éditions d’antan, où plusieurs centaines d’entre vous se réunissaient en sol universitaire pour de joyeuses retrouvailles.
Malgré ces aléas organisationnels, je ne peux conclure ce petit mot sans exprimer mes remerciements les plus chaleureux à Federica Vairo et Véronique Chetmi, qui se sont jointes à moi pour former le comité organisateur. Sans elles, ce congrès n’aurait jamais vu le jour. Les membres du comité scientifique, composé de Brice Simeu, Andréanne Bissonnette, Luc Turgeon et votre humble serviteur n’ont ménagé aucun effort pour vous offrir un programme riche et diversifié. Je désire également exprimer ma gratitude à l’endroit de Laurence Bhérer, Guy Lachapelle et Luc Turgeon, ainsi que les membres des comités qu’ils ont mis en place, pour la sélection des prix remis par la SQSP. Les récipiendaires seront honorés dans le cadre de notre cocktail dînatoire, le vendredi 19 mai en soirée. Lors du cocktail dînatoire, nous aurons aussi le grand honneur d’accueillir François Blais et Yves Montigny pour une discussion animée par la directrice de la revue Politique et Sociétés, Laurence Bhérer, sur le thème du congrès. Je ne peux passer sous silence l’apport déterminant de nos étudiants bénévoles, qui ont répondu promptement à mon appel de veiller au bon déroulement de notre activité annuelle. Je les remercie de leur sens du devoir exemplaire. Enfin, mes derniers remerciements vont à vous tous et toutes, qui ont su renverser la vapeur d’une certaine « crainte » d’un retour en présentiel. Pour cela, vous méritez mon éternelle reconnaissance.
En vous souhaitant à toutes et tous des discussions fructueuses et un excellent Congrès 2023.
Érick Duchesne,
président de la Société québécoise de science politique
Panels
P1. Les transformations de l’action publique et de l’administration publique
19 mai 2023
9h00 – 10h30,
Salle : LAU 1435,
Type d’activité : Panels
Présidence : Pierre-Marc Daigneault
Communication 1 : Dans l’antichambre de la décision politique : les travaux de la commission parlementaire québécoise sur la protection juridique des lanceurs d’alerte
Sébastien Houle, Université du Québec à Trois-Rivières
France Aubin, Université du Québec à Trois-Rivières
La recherche dont nous souhaitons rendre compte porte sur la construction du problème public de la protection juridique des lanceurs d’alerte. Nous appuyant sur la sociologie politique des problèmes publics (Érik Neveu), nous avons étudié les interventions d’acteurs appartenant à différentes sphères d’activités (politique, journalisme, syndicat…) devant l’institution parlementaire du Québec en 2016, dans le cadre des consultations publiques sur le projet de loi n° 87, Loi facilitant la divulgation d’actes répréhensibles dans les organismes publics. Nous nous sommes donc concentrés sur un mécanisme institutionnel précédant immédiatement la mise en œuvre d’une solution politique au problème public. Nous souhaitions évaluer le décalage éventuel entre la loi et les discussions tenues immédiatement avant son adoption. Rappelons qu’il existe 2 grandes conceptions du lanceur d’alerte (Foegle 2014) : 1- une conception restreinte, qui voit le lanceur d’alerte comme un « dénonciateur légal », agissant dans un cadre défini par les autorités ; 2- une conception plus ouverte, le concevant de manière plus politique, guidé par sa conscience, dénonçant des actes qu’il juge irréguliers dans le but d’activer un débat public. Nous avons travaillé à partir d’une grille d’analyse à quatre (4) variables (France Aubin et al.). Selon celle-ci, le lancement d’alerte peut être observé en suivant a) son objet, b) son mode, c’est-à-dire le canal par lequel l’alerte est activée, c) le statut de la personne qui lance l’alerte, d) de même que la motivation qui l’anime. Chaque dimension peut être située sur un continuum allant de la restriction à l’ouverture.
L’analyse des discussions montre : 1) que plusieurs intervenants avaient une conception plus ouverte du lancement d’alerte que celle qui figure dans la loi adoptée en 2017 ; 2) qu’il existait une tension entre les tenants d’une liberté d’expression assumée, érigée sur le socle de l’intérêt public, et les défenseurs d’un devoir de loyauté à l’organisation, garant d’une administration s’activant en marge du débat public ; 3) que les représentants de la société civile et les détenteurs du pouvoir s’opposaient sur ce qui pouvait légitimement être dit (l’objet) et les canaux par lesquels la parole pouvait transiter (le mode de l’alerte). Au final, si les travaux de la Commission paraissent s’apparenter à un processus de négociation, ils demeurent le fait d’un public faible (Nancy Fraser), privé d’un pouvoir décisionnel qui lui permettrait de modifier durablement l’accès du droit à l’information nécessaire à la négociation des enjeux sensibles dans notre société.
Communication 2 : L’analyse du changement dans l’action publique : quelques perspectives théoriques et conceptuelles
Daniel Bial, Université du Québec à Trois-Rivières
La question du changement est ancienne dans l’analyse des politiques publiques et traverse plus ou moins explicitement tous les courants. Les travaux sur la mise en œuvre (Wildavsky, 1979), les analyses fonctionnalistes et systémiques (Easton, 1975 ; Parsons, 1951), cognitives (Sabatier 1988 ; Sabatier et Jenkins-Smith 1993 ; 1999 Sabatier et Zafonte, 1997 ; Hall, 1993 ; Jobert et Muller, 1987), celles sur les héritages (Hogwood et Peters, 1983), celles développant la notion de recyclage et transcodage (Lascoumes, 1994), ou encore celles sur la décision (Lindblom, 1959 ; Simon, 1978 ; Pierson, 1993), tous évoquent des politiques qui changent, évoluent ou au contraire génèrent des effets d’inertie.
Cette polymorphie de l’action publique est mieux explicitée par Lindblom. Pour ce spécialiste des questions de changement dans les politiques publiques, « Policy is not made once and for all ; it is made and re-made endlessly. Policy-making is a process of successive approximation to some desired objectives in which what is desired itself continues to change under consideration » (Lindblom, 1959). Aussi, selon Jobert et Muller (1987), les politiques doivent changer parce qu’elles doivent s’adapter à un nouvel environnement, mais en même temps leur objet est de modifier ce même environnement. Par-là, l’on comprend que les politiques publiques quelques soient leurs secteurs ne sont pas figées dans le temps. Elles sont contraintes à changer au gré des objectifs escomptés. Cette obsession pour le changement est sans doute l’une des composantes principales des idéologies politiques du siècle présent en particulier dans de nombreux secteurs de l’action publique. Aucun dirigeant, de nos jours, ne peut/veut situer son action en dehors de cette perspective. C’est dire à quel point le changement est central dans le champ des politiques publiques. Pour certains auteurs même, il constitue la raison d’être de celles-ci. Selon Muller (2005) une politique publique se définit toujours par rapport au changement. Les systèmes de représentation s’accumulent, se transposent, se chevauchent et constituent un véritable foisonnement de visions du monde et d’orientation ne cessant de reformuler les politiques publiques à toutes leurs étapes (fabrique, mise en œuvre, etc.) et de redéfinir les conditions de structuration de l’action publique. Comment analyser le rythme, le sens et les modalités de changement des politiques publiques ? Quels sont les dimensions et les outils d’analyse qui permettent aujourd’hui de caractériser et d’analyser les évolutions contemporaines de l’action publique ? Telles sont les questions auxquelles cette proposition essaye de répondre.
Communication 3 : Transformation de l’action publique et autonomie des universités
Abdoulaye Anne, Professeur agrégé, Département des fondements et pratiques en éducation, Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval
Etienne Chabot, Candidat à la maitrise en administration et politiques de l’éducation, Département des fondements et pratiques en éducation, Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval
Les travaux récents issus de la sociologie de l’action publique font état de l’émergence d’enjeux qualifiés de nouveaux risques (Muller, 2015; 2018; Hassenteufel, 2021; Hassenteufel et Saurugger, 2021), tels que les crises financières, sanitaires ou écologiques. La prise en charge par l’action publique de ces enjeux globaux appelle le développement de nouveaux instruments d’action publique qui participent à la transformation du rôle de l’État et de ses rapports avec les acteurs (Hassenteufel, 2021). Pour Pierre Muller (2015, 2018), la transformation de l’action publique s’inscrit plus largement dans la recomposition du rapport entre le global et le sectoriel, dans un contexte de pressions contradictoires venant contraindre les États. D’un côté, la capacité des politiques publiques sectorielles à assurer la mise en ordre de la société est remise en question en raison du caractère global et intersectoriel de ces nouveaux enjeux (la désectorisation de la société). D’un autre côté, des demandes de plus en plus fortes sont adressées aux États afin qu’ils interviennent afin de réguler ces problèmes collectifs. Muller (2015) fait l’hypothèse que cette transformation de l’État s’inscrit dans un changement de cycle d’action publique qui s’opère depuis les années 2010 avec l’émergence d’un nouveau référentiel politique de l’efficacité globale. Ce référentiel représente la nouvelle vision du monde, laquelle va établir le cadre des relations (coopération ou affrontement) entre les acteurs sectoriels (Lessard et Carpentier, 2015).
Dans le cadre de ce changement de cycle d’action publique, nous nous intéressons plus particulièrement au rapport entre les référentiels sectoriel et global suivant la recomposition des systèmes d’enseignement supérieur et de l’évolution des politiques universitaires dans le contexte de transformations sociétales (Lessard et Carpentier, 2015; Lessard, 2016; Doray, 2017; Bernatchez, 2019; Cayouette-Remblière et Doray, 2022). Suivant les quatre dimensions de la configuration du cycle d’action publique, telles que définies par Muller (le régime de globalisation, le régime économique et social, le régime de citoyenneté et le régime d’action publique), notre propos vise à soulever un certain nombre d’observations sur les évolutions plus récentes (en tenant compte notamment de la crise sanitaire de la COVID-19) de la relation entre l’État, les acteurs et les universités, établie traditionnellement selon le principe de l’autonomie institutionnelle de celles-ci, que nous identifions comme un référentiel sectoriel qui donne sens aux actions des membres de la communauté universitaire (Anne et Chabot, 2022).
Communication 4 : Les fardeaux administratifs : enjeux et perspectives
Pierre-Marc Daigneault, Université Laval, Département de science politique
Samuel Defacqz, Université Laval, Département de science politique
Claire Dupuy, UCLouvain, Institut de sciences politiques Louvain-Europe
Les fardeaux administratifs renvoient au phénomène selon lequel des individus perçoivent la mise en œuvre des politiques et, plus généralement, leurs interactions avec l’État et les acteurs publics comme coûteuses et difficiles (Burden et al., 2012; Baekgaard & Tankink, 2021). La littérature existante souligne que les citoyens sont en effet confrontés à des coûts d’apprentissage lorsqu’ils acquièrent de l’information sur les programmes et services publics, à des coûts de conformité lorsqu’ils tentent de satisfaire aux règles de ces programmes et services publics, et à des coûts psychologiques comme le stress, le sentiment de perte d’autonomie et la stigmatisation, découlant de ces démarches ou des programmes et services publics eux-mêmes (Moynihan et al., 2015). Depuis une décennie, cette littérature s’est développée de manière importante avec des contributions issues de l’administration publique et de la science politique en tout premier lieu. Cet article a pour objet de faire le bilan de ces récents développements en proposant une cartographie de ce courant de recherche sous plusieurs angles : théorique (quels sont les concepts et les outils théoriques mobilisés et quels sont les débats et enjeux politiques, administratifs et sociaux qui structurent ces travaux ?), analytique (quelle est l’étendue des analyses sur les fardeaux administratifs et quels en sont les principaux résultats ?) et méthodologique (comment opérationnaliser les concepts centraux de cette littérature ?). Ce faisant, s’inscrivant dans une démarche cumulative (Halling & Bækgaard, 2022 ; Madsen et al., 2022 ; Mesnel, 2021), l’article vise non seulement à identifier des pistes de recherche future, mais il répond aussi, en mettant en exergue les travaux québécois, français, belges et suisses sur la question, au besoin de faire connaître aux universitaires francophones une littérature majoritairement anglophone.
P2 Gestion des contentieux territoriaux/frontaliers en Afrique centrale: Entre retour à la négociation et recours à la justice internationale
19 mai 2023
9h00 – 10h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panel
Responsable du panel : Juliette Mbala Bessa, Université de Yaoundé 1
Le tracé des frontières en Afrique, initié à la fin du XIXe siècle, exécuté à travers l’institutionnalisation du principe de l’Hinterland, a permis à terme, de reconfigurer l’Afrique à travers des territoires «fantômes» ; c’est-à-dire sans réelle homogénéité. Ainsi, les frontières africaines, révélées imparfaites, se sont réduites aux fleuves pour la plupart. Cette artificialité imposée par la deuxième conférence de Berlin de 1884, érigée en thème classique par les anticolonialistes au début des années 1960, assimilée au principe de l’Utis Possidetis, demeure d’actualité. En effet, d’une superficie de 30,35 millions de km², l’Afrique couvre 6% de la surface totale du globe et environ 20% de la superficie terrestre. Elle dispose de 109 frontières internationales terrestres faisant plus de 170 000 kilomètres.
Au début de ce siècle, des études consolidées faisaient état de ce que 44% des frontières africaines suivaient les méridiens ou les parallèles et 30% des lignes droites ou courbes ; toute chose qui constituait une « indication claire de la nature arbitraire des frontières africaines». Par conséquent, selon l’estimation d’Asiwaju, 104 frontières internationales existaient en Afrique en 1984-1985 et divisaient 177 régions ou groupes culturels. Pour apporter un début de solution à cette artificialité afin de faire de la frontière un espace d’échanges et de coexistence sociale, le Programme Frontière de l’Union Africaine (PFUA) a été mis sur pied en 2007. Celui-ci entendait répondre à trois impératifs : géopolitique ; géoéconomique et socio-économique. Toutefois, seulement 35% des frontières africaines étaient démarquées en 2020. Pour en réduire l’acuité l’OUA et l’UA ont élaboré une politique axée sur la gouvernance conjointe des frontières, grâce à laquelle les États peuvent consolider une coexistence pacifique des peuples et ainsi assurer leur droit de vivre dans la paix et la sécurité. En 2013, à l’occasion de la célébration du 50e anniversaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine (devenue Union africaine en 2002) les dirigeants avaient cru bon de susciter un projet novateur autour de la «frontière africaine» qu’ils espéraient voir s’ériger en creuset de convivialité et de prospérité. Pour apporter un début de solution et faire de la frontière un espace d’échanges et de coexistence sociale, le Programme Frontière de l’Union Africaine (PFUA) a été mis sur pied en 2007. Celui-ci entendait répondre à trois impératifs : géopolitique; géoéconomique et socio-économique.
Quels acteurs et modalités sont-ils mobilisés pour gérer les contentieux frontaliers en Afrique centrale ? Quels sont les ressorts de la préférence entre le recours à la négociation et la saisine de la juridiction internationale ? Le présent panel entend analyser quelques-uns des 9 conflits frontaliers (en cours ou latents) en Afrique centrale. Il sera, également, question de la mise en perspective analytique de sept frontières pilotes identifiées par la CEEAC, depuis 2009, comme potentiels points de départ des conflits violents entre les États membres.
Communication 1 : « Les sept frontières potentiellement conflictuelles en Afrique centrale : une mise en perspective analytique »
Ibrahim Mfoundikou, Université de Yaoundé I
Le tracé des frontières en Afrique, initié à la fin du XIXe siècle, exécuté à travers l’institutionnalisation du principe de l’Hinterland, a permis à terme, de reconfigurer l’Afrique à travers des territoires « fantômes » ; c’est-à-dire sans réelle homogénéité. Ainsi, les frontières africaines, révélées imparfaites, se sont réduites aux fleuves pour la plupart. Cette artificialité imposée par la deuxième conférence de Berlin de 1884, érigée en thème classique par les anticolonialistes au début des années 1960, assimilée au principe de l’Utis Possidetis, demeure d’actualité. En effet, d’une superficie de 30,35 millions de km², l’Afrique couvre 6% de la surface totale du globe et environ 20% de la superficie terrestre. Elle dispose de 109 frontières internationales terrestres faisant plu de 170 000 kilomètres. Toutefois, seulement 35% des frontières africaines étaient démarquées en 2020. Elles le demeurent également lorsqu’elles contiennent des ressources naturelles. Pour en réduire l’acuité l’OUA et l’UA ont élaboré une politique axée sur la gouvernance conjointe des frontières, grâce à laquelle les États peuvent consolider une coexistence pacifique des peuples et ainsi assurer leur droit de vivre dans la paix et la sécurité.
La présente réflexion s’inscrit dans un cadre mettant en relief sept pays d’Afrique centrale (Cameroun, Tchad, République Centrafricaine, Congo-Brazzaville, Gabon, République démocratique du Congo et Rwanda) et envisage analyser 9 conflits frontaliers (en cours ou latents) avec descente sur quatre terrains.
Communication 2 : « La commission mixte Cameroun-Guinée Équatoriale et la gestion des incidents frontaliers depuis 1976 »
Kouotou Aboubakar Sidick, Université de Yaoundé I
Le conflit frontalier entre le Cameroun et la Guinée-Equatoriale, deux pays voisins d’Afrique centrale partageant 200 km de frontières, date de 1976. En effet, cette année, l’armée camerounaise avait occupé la localité proche de la rivière Bibé à 2km d’Ebebiyin (Guinée Equatoriale). Depuis lors, des escarmouches régulières sont perceptibles, manifestées par la fermeture périodique de leur frontière commune par les autorités équato-guinéennes.
C‘est ainsi qu’en juillet 2019, la Guinée Equatoriale avait manifesté, unilatéralement, la volonté d’ériger un mur sur la frontière commune. Plus tard, au même endroit, Malabo a entrepris la construction de miradors ; ce qui a ravivé des tensions entre Yaoundé et Malabo. Car, Yaoundé accusait Malabo d’avoir empiété sur son territoire. Plus tard, le 21 juillet 2020, le Cameroun et la Guinée Equatoriale ont paraphé, à Malabo, un accord de coopération pour la sécurité à la frontière commune entre les deux pays. Malgré cet accord, des incidents sont toujours réguliers à cette frontière, alors que la commission mixte Cameroun-Guinée Equatoriale semble être en léthargie.
Ainsi, quels rôle et responsabilité peuvent-ils être attribués à cette commission mixte au regard de la récurrence des incidents frontaliers ? Quel type d’accord est-il susceptible de parvenir à la gestion consensuelle de cette frontière commune ?
Communication 3 : « Gabon-Guinée Equatoriale : rétrospectives et perspectives de la gestion du différend autour de l’îlot de Mbanié et îles adjacentes »
Njimontie Temgbet Issofa, Université de Yaoundé I
L’îlot de Mbanié ou Mbanié, tiré dans les eaux territoriales du golfe de Guinée, constitue une pomme de discorde entre le Gabon et la Guinée Équatoriale. Il s’agit d’un espace insulaire jadis banal, oublié par les protagonistes d’aujourd’hui, jetant à des séquences disproportionnées du froid dans les relations bilatérales entre le Gabon et la Guinée Équatoriale. Depuis l’émergence de ce problème autrement appelé « affaire de Mbanié », s’alternent répit, antipathie, dénonciation, occupation militaire, négociation…. L’imprécision des positions des belligérants concernés et leur extrême susceptibilité n’assurent pas outre mesure un dénouement immédiat de cette affaire qui a commencé en 1972. En effet, le 12 septembre 1972, l’ambassadeur de Guinée Équatoriale à l’ONU exposa le problème au conseil de sécurité des nations unies. Mais le roi Hassan II du Maroc, alors Président en exercice de l’OUA, évita que l’ONU ne vienne à traiter de la question. Il mit donc en place une commission de médiation avec les Présidents Joseph Désiré Mobutu du Zaïre et Marien Ngouabi du Congo-Brazzaville. C’est ainsi que deux réunions, tenues à Kinshasa, puis à Brazzaville, en octobre 1972, n’ont pu permettre de résoudre le problème. En 1972, une intervention de feu Mobutu Sese Seko, Président du Zaïre, (actuel République démocratique du Congo), avait mis un terme à une vive tension entre les deux pays. Ainsi, ces derniers avaient manifesté la volonté de s’en remettre à une instance internationale pour résoudre le litige.
En tout état de cause, le conflit frontalier Gabon-Guinée Equatoriale, datant de la fin de la décennie 1970, est aujourd’hui porté à la Cour internationale de justice depuis mars 2021, après qu’un compromis ait été trouvé entre les deux Etats en 2016, lequel est entré en vigueur en mars 2020. Cette communication entend analyser non pas la genèse de conflit frontalier, mais surtout la pertinence des différents compromis obtenus par les deux parties.
Communication 4 : « La borne 13 et la « zone tampon » : retour sur antipathie frontalière camerouno-centrafricaine »
Njutapmvoui Mfouzie Arami Raoul, Université de Yaoundé I
Le Cameroun est un pays de l’Afrique centrale, membre de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT) et de la Commission du golfe de Guinée (CGG). Il est situé sur le flanc occidental de l’Afrique centrale et sur le versant oriental du golfe de Guinée. Il est limitrophe de la RCA, au sud-est, avec laquelle il partage 800 km de frontière commune.
A l’Est du Cameroun, les escarmouches sont récurrentes, à propos des frontières avec la RCA. La frontière, matérialisée par une borne (borne 13) à quelques centaines de mètres de la ville camerounaise de Garoua-Boulaï, laisse une zone de 150 m entre les postes frontaliers des deux pays. Cette zone, baptisée « zone tampon » par les Centrafricains, entretient une inimitié chronique entre les deux peuples. Disparue au début de la décennie 1980, la borne 13 a été réinstallée en 2001. Détruite nuitamment après son installation, cette borne, objet d’antipathie camerouno-centrafricaine, semble meubler les rencontres de la commission mixte Cameroun-RCA, sans qu’une nouvelle ne soit installée.
L’expression au présent de ce 60e congrès de la SQSP donne l’occasion de réexaminer ce conflit frontalier certes latent, mais susceptible de devenir majeur. Ainsi, quelles sont les interprétations en rapports avec la borne 13 et la « zone tampon » ? Quelle est l’acuité du différend entre les deux pays et quels en sont les compromis obtenus depuis lors ?
P3 Démocratie et contestation : nouvelles perspectives normatives en théorie politique
19 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panel
Communication 1 : Polémique sur la scène publique : penser le « public » à partir de l’idéal néorépublicain de la non-domination
Sylvain Bérubé, Université d’Ottawa
Depuis la publication de Republicanism du philosophe Philip Pettit (1997), l’idéal républicain de la non-domination a su gagner en popularité au sein de la discipline de la pensée politique. Pettit privilégie une approche dite néorépublicaine dont les fondements théoriques ont offert des pistes productives pour réfléchir à des enjeux contemporains tels que les questions d’accommodements de la diversité (Laborde 2010; Spitz 2022), pour réfléchir à vulnérabilité de certaines catégories de personne (Garrau et Le Goff 2009) ou encore pour repenser à la participation publique du corps citoyen (Maynor 2003). Cette revalorisation de la tradition républicaine entraîne notamment une revitalisation de la question de l’espace public qui s’articule comme une réponse aux débats opposants libéraux et communautariens au cours des années 1990.
Le néorépublicanisme fait appel de diverses manières à la notion d’espace public, soit dans sa conceptualisation des modèles démocratiques, par sa théorisation de la civilité ainsi qu’à travers la place qu’occupent les notions d’intérêt et d’intérêt commun dans cette théorie. À travers d’une discussion sur l’espace public avec la critique féministe développée à la fin du XXe siècle, cette communication exposera la façon dont la conception néorépublicaine du public se démarque de la tradition républicaine. Il sera argumenté que l’idéal de la non-domination, réfléchi à partir des théories féministes (Benhabib 1993, 1997; Butler 2015; Fraser 1990; Pitkins 1984) et néorépublicaines, offre un potentiel désormais incontournable pour conceptualiser le public. Cette communication s’insère dans une réflexion plus large sur la théorie néorépublicaine du droit à l’autodétermination des minorités. Elle vise réfléchir aux fondements d’un modèle praxéologique du public ancré dans les pratiques quotidiennes des sujets politiques qui entend surmonter les limites matérielles issues de la binarité du modèle public/privé.
Communication 2 : Émeute, représentation, démocratie: une théorie politique de l’émeute
Alexis Bibeau, Université de Virginie
La théorie de la résistance politique connait un regain d’intérêt dans les dernières années, notamment sous la forme d’une critique de la théorie rawlsienne de la désobéissance civile. Dans cet essai, je me penche sur les préoccupations qui caractérisent ce tournant critique vers une théorie de la résistance « non civile » et développe, sur ces bases, une théorie politique de l’émeute.
Une théorie de l’émeute doit toutefois être dévelopée avec prudence puisque l’émeute est généralement rejetée comme une action politique antidémocratique. En effet, bien qu’à la suite des événements sociopolitiques du dernier siècle il soit désormais admis qu’en démocratie la résistance non-violente est justifiée, permise et même parfois légale, cette tolérance ne s’étend que rarement aux actions politiques violentes telles que l’émeute. La résistance politique violente est rejetée pour des raisons sont, dans la plupart des cas, légitimes. Cependant, la nature problématique de la violence politique n’implique pas qu’elle soit toujours incompatible avec la démocratie. La place de la résistance violente, et donc de l’émeute, est à cet égard plus nébuleuse qu’il n’y paraît de prime abord.
L’objectif dans cet essai est ainsi d’analyser les fondements théoriques de l’émeute politique à partir des perspectives offertes par la théorie démocratique contemporaine et par la théorie de la résistance. En s’appuyant sur la théorie constructiviste de la représentation politique, Alexis Bibeau élabore plus précisément l’idée que les émeutes politiques peuvent être conceptualisées comme une forme de représentation politique informelle.
Son argumentaire repose sur la possibilité que des représentants informels (i.e., des agents politiques non élus ou sélectionnés pour représenter les autres par une procédure de sélection systématisée) puissent agir politiquement pour les autres de façon légitime, et considère donc la représentation comme un principe central de la démocratie mais questionne les notions d’autorisation, de reddition de compte et de représentés associés à cette notion. Enfin, j’analyse comment l’émeute politique comme mode de représentation informelle correspond plus étroitement à notre compréhension empirique de tels événements.
Plus largement, cet essai met, premièrement, l’accent sur le role des acteurs informels, y compris les acteurs litigieux voire même violents, dans la poursuite d’objectifs politiques, et cherche, deuxièmement, à offrir une analyse nouvelle de l’émeute comme action politique en démocratie.
Communication 3 : Altérer les orientations normatives : une résistance « invisible »
Justine Perron, candidate au doctorat en Science politique à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Sous la supervision de Sophie Bourgault.
Plusieurs ont observé une transposition de la réappropriation du discours – un véhicule de résistance popularisé entre outre par l’œuvre de Butler – vers l’esthétique queer. En effet, les personnes queer ont été marginalisées à cause de leur orientation sexuelle/identité de genre, mais également en raison de leur apparence parfois « hors-norme » (expression de genre). Certain.es se sont donc réapproprié un esthétique péjoratif pour en faire une marque de fierté. Cette adaptation de la performativité butlérienne à la corporalité du sujet peut se traduire par une « politique du visible », célébrant les identités visiblement marginalisées (ayant « l’air gay ») parce qu’elles défient les conceptions normatives du genre par leur seule présence dans l’espace social.
Bien que cette stratégie subversive soit souhaitable à plusieurs égards, elle comporte des limites – notamment la dévalorisation de certaines identités « passant pour hétérosexuelles » (ex. lesbienne femme), la présence de chevauchements avec certains principes néolibéraux (individualisme, compétition, intégration). Il nous semble donc qu’une performativité corporelle axée sur le corps perçu – envisagé en termes d’esthétique – reste partielle, et qu’il faudrait plutôt imaginer une résistance corporelle à l’idéologie passant par le corps vécu.
Dans notre communication, nous proposerons que l’espace de risque situé entre le corps perçu et le corps vécu détient un potentiel de désorientation prometteur pour la lutte « femme », suivant une phénoménologie ahmédienne. En effet, bien que l’émancipation femme des années 90 concernait davantage la réappropriation de la féminité par l’esthétique queer (concordant avec les politiques du visible), un renouveau de la théorie femme revisite la résistance queer à partir du corps et des affects. Nos objectifs concordent avec cette littérature récente, mais nous souhaitons également rendre compte de l’identité femme comme identité involontairement passing, puisque cette capacité à passer peut s’avérer un outil quotidien dans la lutte à l’idéologie dominante.
P4 Gestion concertée des flux migratoires Afrique-Europe: Contours des négociations politiques et des accords conclus depuis 2000
19 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panel
Responsable du panel : Juliette Mbala Bessa, Université de Yaoundé 1
Les migrants (surtout irréguliers) sont au cœur des préoccupations européennes depuis plusieurs décennies. Les espoirs charriés par l’euphorie des indépendances africaines n’ont pas su entretenir le rêve des masses populaires. L’extrême rajeunissement de la population africaine, sans avoir été une préoccupation majeure des premiers dirigeants et, probablement, des chefs d’État actuels, décline chaque jour ses réalités : misère, sous-emploi, la séduction de l’ailleurs, traversée périlleuse de la Méditerranée, morts par noyade, etc.
Selon les chiffres provisoires de 2022 (janvier-octobre) concernant l’immigration clandestine en Europe, fournis par les ministres de l’Intérieur de l’Union européenne, la route centrale (Afrique-Europe à travers la Méditerranée) sur la base des données de Frontex et du ministère de l’Intérieur espagnol, est le principal circuit de passage des migrants clandestins, transitant par la Tunisie et la Libye. C’est en tout 79 140 arrivées irrégulières d’Africains en Europe, pour l’année 2022 (contre 67 724 arrivées clandestines en 2021. Ensuite, arrive la route orientale par laquelle 35 343 arrivées irrégulières ont été enregistrées (passant par la Turquie, la Grèce et les Balkans) en 2022, contre 20 567 sur toute l’année précédente. Enfin, la route occidentale (passant par l’Espagne, Ceuta et Melilla), la moins empruntée en 2022, a enregistré 28 032 arrivées irrégulières, essentiellement des Africains, contre 42 000 arrivées clandestins l’année précédente.
Face à ce flux migratoires souvent incontrôlé, l’Union européenne, après les lois françaises anti-immigration clandestine (loi Bonnet de 1980, loi Pasqua de 1986, lois Joxe de 1989, etc.), a engagé des pourparlers avec les pays africains en vue de restreindre le flux migratoire irrégulier. Bien que des négociations soient encore en cours, un certain nombre d’accords a permis de mettre sur place deux outils susceptibles de s’attaquer aux causes profondes des migrations et de réduire leur acuité en direction de l’Europe : le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique (FFUE) et l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI). Au regard des derniers développements, il importe d’analyser le contexte, le contenu et l’efficacité des négociations ainsi que des accords conclus par l’Afrique et l’UE. Quelles négociations politiques ont-ils été engagés et quels accords conclus en rapport avec la gestion concertée des flux migratoires depuis 2000?
Communication 1 : « La France est-elle méfiante du trop-plein d’Africains ? Les lois françaises face au phénomène migration depuis 1972»
Njapndounke Pare Aïchetou, Université de Yaoundé I
Aux heures glorieuses où les Africains construisaient des lignes de métro à Paris, la France chantait la prospérité. L’ordonnance du 02 novembre 1945 encourageait l’importation d’une main-d’œuvre pour la reconstruction de la France dont le monopole de recrutement des travailleurs était confié à l’Office national de l’immigration (ONI). Grâce aux efforts des immigrés, la France a siégé au concert des nations prospères avant la crise de la fin de la décennie 1960. En 1972, les premières tensions apparaissent sur le marché de l’emploi. Les circulaires des ministres Fontanet de l’intérieur et Marcellin du travail annoncent la fin des régularisations et le début de la lutte contre les sans-papiers. Face à la persistance de la crise en 1974, le gouvernement français s’engageait à intégrer les immigrés et à stopper l’importation de la main-d’œuvre. En 1980, la Loi Bonnet retouche l’ordonnance de 1945 et évoque-la reconduite à la frontière ou la rétention de tout étranger en situation irrégulière. La loi du 29 octobre 1981 suspend l’expulsion mais défère devant un juge correctionnel tout étranger en situation irrégulière. Bien plus tard, le décret du 27 mai 1982 rédigé par le ministre de l’intérieur Gaston Defferre, instaurait le certificat d’hébergement. La loi du 17 juillet 1984, plus restrictive, limitait le regroupement familial, suspendait le renouvellement automatique du titre de séjour de dix ans mais innovait en créant une carte de résident valable pour dix ans.
La loi Pasqua de 1986 abrogeait quelques dispositions de la loi de 1981 mais transférait le pouvoir de reconduite du juge au préfet. Les lois Joxe du 02 août 1989 abrogeaient quelques dispositions de la loi Pasqua et évoquait le titre de résident reconnu à tout étranger né en France. Pour maîtriser l’immigration, le premier ministre Édith Cresson organisait le premier charter baptisé « charter Cresson» entre 1991 et 1992. De retour dans le gouvernement Balladur en 1993, le ministre de l’intérieur Charles Pasqua avait élaboré plusieurs lois relatives aux contrôles d’identité, aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers et les zones d’attente dans les gares internationales. La loi Debré adoptée par le parlement français le 27 février 1997 est particulièrement répressive. Plus tard, Brice Hortefeux, ministre français de l’immigration et de l’identité nationale, suggérait que les regroupements familiaux des migrants africains installés en France soient assujettis aux tests d’ADN.
Face à la montée d’un sentiment minimalement anti-français dans plusieurs pays africains, il importe aujourd’hui d’en explorer les causes et les contours relatifs à la politique française de gestion des flux migratoires.
Communication 2 : « Du sommet à l’accord de Malte de 2015: Quelles innovations et perspectives en matière de lutte contre l’immigration clandestine ? »
Nchouwat Nchankou Ibrahim, Université de Yaoundé I
Depuis quelques décennies, l’Europe compte sur l’Afrique et la Turquie pour endiguer le flux de migrants en provenance de ces deux lieux. Ce d’autant que l’Afrique est le principal point de départ des migrants à destination de l’Europe. Face à la montée d’un mouvement anti-immigration, l’Union européenne s’est trouvée dans le devoir de mobiliser son appareil diplomatique et politique pour trouver une alternative et réguler, dans le sens inverse, ce flux. C’est dans ce sillage qu’est intervenu le sommet de Malte, tenu à la Valette les 11 et 12 novembre 2015, soldé par un accord. Il y avait été décidé qu’en contrepartie des efforts destinés à freiner les arrivées des migrants irréguliers en Europe, une aide financière d’1,8 milliards d’euros allait être offerte au continent africain.
Quelques années plus tard, en février 2017, s’est tenue la première réunion intercontinentale de haut-niveau pour suivre les progrès accomplis depuis le Sommet de La Valette. A cette occasion, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) avait mis en avant la nécessité de trouver des solutions légales, de mieux protéger les migrants et de respecter les droits de l’homme.
Près d’une décennie, alors que le flux des migrants irréguliers peine à s’estomper, il importe de questionner les contours novateurs de l’accord de Malte. Autrement dit, quelles sont les innovations de l’accord de Malte et pour quelle perspectives au regard du flux migratoire entre l’Europe et l’Afrique ?
Communication 3 : « Le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique : entre approche commune et lutte contre la migration irrégulière »
Ngouot Macho Aminatou, Université de Yaoundé I
Le Fonds fiduciaire de l’UE, lancé lors du sommet de La Valette sur la migration, le 12 novembre 2015 par des partenaires européens et africains, est le principal instrument financier utilisé par l’UE pour concilier les politiques migratoires avec la politique étrangère et les partenariats en faveur du développement. Il s’agit d’un Fonds d’urgence de l’UE pour l’Afrique dont l’objectif est de parvenir à la stabilité et à la lutte contre les causes profondes de la migration irrégulière et le phénomène des personnes déplacées.
In fine, ce Fonds vise à : accroître les chances que la population puisse trouver de meilleures possibilités économiques : renforcer la résilience des communautés en soutenant l’accès de la population aux services de base tels que la nourriture, l’eau potable, les centres de santé et les écoles, etc. ; améliorer la gestion des migrations en aidant les migrants vulnérables le long des routes migratoires ; améliorer la gouvernance et prévenir le risque de conflits en aidant les pays partenaires à lutter contre le terrorisme, la traite des êtres humains et la criminalité organisée. Compte tenu de l’acuité des phénomènes migratoires et de ses complexités, il importe aujourd’hui d’analyser la pertinence et l’efficacité du Fonds fiduciaire de l’UE. Ainsi, quels bilans peuvent-ils se dégager à l’analyse de la mise en application de ce Fonds ? Constitue-t-il un instrument efficace pouvant servir comme alternative crédible aux migrations irrégulières ?
P5 Les accords politiques et « non politiques » et la crise anglophone depuis 1961
19 mai 2023
16h00 – 17h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panel
Responsable du panel : Adamou Machou Pare, Université de Yaoundé I
Co-responsable du panel : Armel Bruno Nguekam Kenfo, Université de Douala
En juillet 1884, le protectorat est signé entre le gouvernement allemand et les chefs traditionnels duala, créant par le fait même l’entité politique du Kamerun. Le 17 mars 1916, la SDN confie l’administration du protectorat allemand à la France et à la Grande-Bretagne, suite à la défaite allemande à l’issue de la première guerre mondiale. Le Royaume Uni obtint le 1/5 du territoire et la France les 4/5 restant. Le Cameroun était alors juridiquement administré en tant que territoire sous mandat, conformément à l’article 22 du pacte de la SDN du 28 Juin 1919. Le Royaume Uni, suite à l’ordonnance sur l’administration du Cameroun en 1924, divise le Cameroun en Northern Cameroon qui, lors des referendums du 11 et 12 février 1961, a opté pour le rattachement au Nigeria et le Southern Cameroon qui se raccorda à la République du Cameroun et devient indépendant le 1er octobre 1961.
La question anglophone qui rebondit sur la scène politique camerounaise en 2016 tire ses racines dans le temps long de l’histoire même du pays. En effet, le mécontentement et la meurtrissure des anglophones sont la résultante du floue juridique, de l’enjôlement d’une politique autrement centraliste entretenue par le gouvernement depuis la fusion définitive et officielle des populations du sud du Cameroun avec la République du Cameroun le 1er octobre 1961. Une réunification mal conduite, fondée sur un projet centraliste et assimilationniste qui a mené à un sentiment de marginalisation économique et politique de la minorité anglophone et à une prise en compte défectueuse de sa différence culturelle. En clair il s’agit des mouvements identitaires récriminant le retour au modèle fédéral existant entre 1961 et 1972. Dans les linéaments de l’assise de l’Etat du Cameroun, un certain nombre d’accords politiques et même de consensus tacites ont été conclus entre les différentes parties. Mais, 55 ans (1961-2016) après la réunification des deux Cameroun, arbitrairement divisé par la France et le Royaume-Uni dans la déclaration de Londres de 1919, l’unité retrouvée, qui semblait définitivement acquise, commence à battre de l’aile. L’intégrité territoriale du Cameroun est menacée par les aspirations d’un mouvement séparatiste.
Alors, au-delà d’une unification politique au carrefour des héritages français et britannique, marquée du sceau d’un discours de réunification masquant les frustrations, cette étude se propose d’analyser l’ascendant des accords politiques et non politiques sur le déclenchement, en prélude à la crise anglophone. Ceci étant, comment comprendre la survenance de la crise anglophone, nonobstant la prégnance des accords multiformes sur la cristallisation des identités au moment de la réunification dont les connotations étaient autant culturelles que linguistiques ? Le non-respect des arrangements et des accommodements tributaire à la constitution d’une fédération très centralisée, imposée par Ahidjo à John Ngu Foncha à la conférence de Foumban n’est-il pas à la base des aspirations séparatistes des anglophones ?
Communication 1: « La conférence constitutionnelle de Foumban, une ruse politique à l’origine du problème anglophone au Cameroun »
Adamou Machou Pare, Université de Yaoundé I
La célébration du cinquantenaire de la réunification du Cameroun a fait rejaillir la question anglophone à travers une médiatisation inaltérable dans les journaux. Ce rebondissement sur la scène politique camerounaise dans les faits en 2016 tire ses racines dans le temps long de l’histoire même du pays. En effet, le plébiscite du 11 février 1961 sous les auspices des Nations Unies hélait les populations du Cameroun méridional et septentrional à répondre à un certain nombre de questions entre rattachement avec la fédération indépendante du Nigeria et l’unification avec la république indépendante du Cameroun. C’est alors que la réunification du Cameroun fut effective avec pour principaux artisans John Ngu Foncha et Ahmadou Ahidjo qui, en implémentation de ce dessein prévu pour le 1er octobre 1961, organisèrent la conférence constitutionnelle de Foumban du 17 au 21 juillet 1961. Cette conférence est considérée comme le point d’orgue du problème anglophone car, elle marque un tournant décisif d’un mariage que les anglophones appellent « mariage de dupe ». Ils estiment avoir été pris au piège par Ahidjo à travers un banditisme politique des francophones. Cette assise réunissait autour d’une même table des délégués du Southern Cameroons conduits par leur premier ministre John Ngu Foncha et les délégués du Cameroun francophone conduits par leur président Amadou Ahidjo. Des lors, la fourberie venait du fait que le président Ahidjo avait pris le soin de se rendre à Foumban avec la constitution d’une république fédérale déjà élaborée avec le concours de Paris.
Cette communication met en exergue la conférence historique de Foumban comme une étape importante de la fondation de la Réunification du Cameroun et par conséquent du problème anglophone. Le caractère consensuel de la constitution adoptée à Foumban est ainsi un élément réconciliateur et une opportunité de règlement de ce problème, vieux de plusieurs décennies.
Communication 2: « Le forum de la diaspora et le grand dialogue comme instruments de résolution de la crise anglophone ? »
Armel Bruno Nguekam Kenfo, Université de Yaoundé I
Depuis novembre 2016, une crise secoue les régions anglophones du Cameroun. A l’origine, le respect du mot d’ordre de grève initié par les enseignants et les avocats originaires desdites régions. La fragmentation visible de la société qui en découle s’est enlisée en conflit armée. Les revendications corporatistes ont cédé place à celles politiques, avec une confrontation entre les partisans de l’idée fédérale et sécessionniste. Il s’agit de la conséquence du « problème anglophone ». En effet, les étapes de la construction nationale qui ont consacré l’effondrement l’Etat fédéral au profil d’un état unitaire centralisé au Cameroun, ont ouvert la voie de pandore à un sentiment de marginalisation de la part des anglophones. Se sentant exclu à travers les institutions et l’assimilation linguistique par la prépondérance du français, les anglophones (juste 20% de la population camerounaise) ont cédé à la violence pour mettre au gout du jour une vexation historique qui résulte à la fois des bavures coloniales et des insuffisances de la construction du contrat sociale par les gouvernements successifs du Cameroun.
La crispation du climat politique du fait de cette crise qui a déjà fait plus de 3000 morts n’a pas laissé le gouvernement camerounais indifférent. Les mécanismes de résolution de ce conflit ont entraîné une kyrielle de mesures et d’ajustements politiques, outre l’usage de la formation. Au rang des instruments mobilisés, on peut mettre en exergue l’organisation du forum de la diaspora ; la tenue du Grand dialogue national, la création d’une section du common law à l’ENAM (Ecole Nationale de l’Administration et de la Magistrature) ; la création d’une Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme ; la promesse de prise en charge rapide des enseignants sortis des écoles de formation… sont entre autres, les tentatives de solutions proposées par le gouvernement. Cependant, cette communication mettra un accent quasi-exclusif sur le forum de la diaspora et le grand dialogue comme instruments de négociation politique en vue de juguler la crise anglophone. Autrement dit comment analyser la place de ces deux instruments, surtout après 6 ans de conflit violent.
Cette communication s’appuie sur de nombreuses sources documentaires analysées sous le prisme historique, mais aussi à travers une observation empirique. Elle met en lumière la difficulté de la négociation dans un environnement dynamique face à la monté des mouvements populaires, et surtout la nécessité de réadapter les mécanismes de construction de la paix dans un monde en pleine mutation.
Communication 3 : « Les mots pour dire la frustration et exprimer les dés-accords au sujet de la crise anglophone au Cameroun »
Lemomo Momo Elvire épouse Tamekamta, Master en Didactique du français, Université de Yaoundé I
Depuis novembre 2016, à la surprise générale pour certains, une crise sans précédent a éclaté dans la partie anglophone du Cameroun. Il s’agit, notamment des régions administratives du Nord-ouest et du Sud-ouest. Bien qu’il soit admis que cette crise à une dimension historique, culturelle et politique, il est important aujourd’hui de remonter l’aune de l’indépendance pour se rendre compte que cette crise s’est conçue et s’est entretenu à travers le discours, la parole, le verbe. En effet, la psychologie nihiliste et le discours contestataire ont été les instruments les plus usagers, avec le recours récurrent aux champs lexicaux de la frustration, de la révolte, de la désobéissance, du rejet de l’autorité étatique…de la violence.
Il peut ici faire référence à la récurrence des termes et expressions tels que : « nous sommes marginalisés » ; « nous avons été trompés » ; « nous sommes vos esclaves » ; « nous ne voulons plus de vous chez nous », etc. Avec une conjoncture politique et un contexte psychosocial favorables, la crise qui éclate en 2016 et qui demeure d’actualité, démontre, à suffire, que la crise (ou la guerre) se conçoit en pensée et s’exprimer par des mots minutieusement choisis. De même, les désaccords au sujet de cette crise sont exprimés par des mots idéalement choisis, les uns plus moins ponctués par une décharge émotionnelle et verbale que les autres.
Pour juguler cette crise, il est préférable de s’intéresser aux mots, à leur contenu, à leur sens et à leur valeur énonciative/énumérative/dénominative/dénonciative, lesquels mettent en relief la frustration et le désaccord. Cette communication entend donc présenter le lien étroit entre la récurrence des champs lexicaux du rejet, de la dénonciation et de la révolte/violence dans la persistance de la crise anglophone et des désaccords subséquents. Communication 4 : « Les accords politiques dans la résolution des conflits en Afrique francophone. Une analyse au prisme de l’approche idéelle de la Francophonie en Côte d’Ivoire et à Madagascar»
Sonia Massa Motsou, Chercheure au Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Science Politique (GIRSP) de l’Université de Yaoundé II
Brigitte Marie Noel Bilo’o, Chercheure au Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Science Politique (GIRSP) de l’Université de Yaoundé II
Suite au conflit survenu en Côte d’Ivoire et à Madagascar, l’on a pu se rendre compte que les institutions ne permettent plus de produire une société objective du fait de leur dénaturalisation. Comment la Francophonie opère –t-elle dans les processus de paix pour amener les différents acteurs au conflit à la conclusion des accords politiques ? Cette communication tente modestement d’y répondre en partant de l’hypothèse que la Francophonie participe de manière significative dans le processus de reconstruction de l’Etat. Cette contribution est adossée sur des déterminants normatifs et institutionnels et des dynamiques opérationnelles observables sur le terrain. L’objectif de cette communication est de préciser et affiner la connaissance sur l’influence cognitive et normative de la Francophonie à accompagner les parties au conflit à la signature d’un accord qui est considérée comme une étape fondamentale de la sortie de conflit. Le néo institutionnalisme et ses 4 variantes sont au cœur de cette étude. L’idée étant d’apprécier les stratégies et les rationalités des différents acteurs intervenant dans le processus devant aboutir à l’accord de paix. La méthode comparative a été mobilisée comme trame méthodologique de l’étude.
Le but étant de mettre en exergue les exceptionnalismes ivoirien et malgache. Le résultat de cette recherche est à percevoir dans sa capacité à démontrer que les idées ne sont plus simplement analysées de manière abstraites, elles peuvent être également concrétisées par des dispositifs matériels dont l’entreprenariat au sein de processus pratiques permet leur imposition mais aussi leur adaptation.
P6 L’influence extérieure en contexte de crise
20 mai 2023
9h00 – 10h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Panel
Modérateur : Pietro Marzo, TELUQ
Communication 1 : La négociation humanitaire sur les lignes de fronts : pratique innovante ou nouvel outil néolibéral?
François Audet, Directeur de l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaires (OCCAH) – UQAM
Myriam Ben Dahmen, Chercheure à l’Observatoire canadien sur les crises et l’action humanitaires (OCCAH) – UQAM
La fin de la guerre froide et la décolonisation ont largement modifié les zones de tensions dans un monde. Ce contexte a notamment fait émerger de nouveaux groupes armés non étatiques dont les revendications sont diversifiées. L’obsolescence de la dissuasion nucléaire et la globalisation de l’économie ont été à l’origine de nombreuses mutations sociopolitiques et économiques ayant conduit vers une nouvelle violence plus ingérable, trouvant sa force dans l’affaiblissement des États et des institutions politiques. Une nouvelle idéologie néo-libérale s’est imposée rendant légitime le recours au secteur privé pour la gestion des risques sécuritaires.
Parallèlement, l’humanitaire s’est retrouvé en pleine crise existentielle durant cette période. La frontière entre l’humanitaire, le militaire et le politique s’est peu à peu brouillée notamment avec le conflit en Afghanistan faisant suite aux attentats de septembre 2001 et la guerre contre le terrorisme. Encore aujourd’hui l’humanitaire se retrouve à chercher sa place dans l’espace humanitaire, dans le respect des principes humanitaires et du droit humanitaire international qui régissent son action. Cette réalité tend à complexifier encore plus l’intervention humanitaire dont le terrain d’intervention est souvent caractérisé par une extrême insécurité et des conditions politiques instables.
La négociation humanitaire s’est érigée, alors, comme une problématique centrale et émergente dans le théâtre des opérations humanitaires complexes. De manière générale, elle est définie comme étant un dialogue entre les acteurs humanitaires et les parties prenantes à un conflit. Adoptant souvent une stratégie intégrative, elle est caractérisée notamment par la divergence des intérêts des parties prenantes dont l’interdépendance, souvent inégale, met le négociateur dans une position de faiblesse. Elle est perçue par certains, comme une fonction spécifique de la diplomatie humanitaire, apparut au début des années 2000, visant la mise en pratique de l’engagement politique « Ne laisser personne de côté ». Toutefois, ce lien entre humanitaire et diplomatie pose de nombreux problèmes notamment à cause des liens étroits que cette dernière entretient avec la politique et qui semblent ne pas correspondre avec les principes universels qui fondent l’action humanitaire. Or, l’humanitaire est en interaction continue avec le politique. Les interventions politiques et militaires au Kosovo et en Afghanistan se sont faites sous le couvert de l’action humanitaire. La création des agences humanitaires interétatiques a encore réduit cet écart. Les négociations humanitaires jouent même, pour certains, un rôle central dans les négociations politiques. Cette relation controversée dans les milieux humanitaires, alimente les débats éthiques. L’intervention humanitaire se retrouve plus complexe et sa perception est tributaire des parties en jeu.
Cette situation engendre beaucoup de questionnement éthique autour de la négociation humanitaire, que cette présentation explorera. A travers une méthodologie qualitative, basée sur des entrevues semi-dirigées et des récits d’expérience, nous tenterons d’analyser comment l’éthique de l’action humanitaire d’un côté et les perceptions éthiques individuelles et organisationnelles, de l’autre, impacte le jeu de négociation. Cette recherche contribue à répondre au besoin de lier les débats opérationnels et théoriques en cours, et d’apporter des éléments de réponse à une thématique encore peu explorée au niveau académique.
Communication 2 : Mobilisation diasporique entre démocratisation et autoritarisme. Le cas de la diaspora tunisienne au Québec.
Pietro Marzo, TELUQ
Le débat académique conceptualise les diasporas comme des acteurs non étatiques capables d’exercer un pouvoir dans les relations internationales. Alors que les chercheurs se sont concentrés sur la mobilisation des diasporas pendant les périodes de démocratisation (Moss 2020, Carmen et al. 2021), moins d’attention a été accordée à la dynamique du pouvoir et à la capacité d’assistance de la diaspora lorsque la démocratie et les institutions libérales de leur pays d’origine sont menacées par l’essor de dirigeants autoritaires. Quel pouvoir les diasporas possèdent-elles pour entraver la régression autoritaire ? Quels sont les outils dont disposent les diasporas pour venir en aide aux populations du pays d’origine lorsque la démocratie est menacée ?
Pour répondre à ces questions, cet article analyse le comportement de la diaspora tunisienne au Québec. L’article examine le rôle que la diaspora a joué dans le changement politique vers la démocratie dans le pays en 2011, ainsi que l’activisme de la diaspora lorsque la démocratie dans le pays a été en danger. L’article est organisé en deux sections principales. Tout d’abord, en s’appuyant sur la littérature secondaire, l’article analyse les typologies d’assistance lors des moments politiques clés. Ce faisant, l’article contribue à conceptualiser le pouvoir des diasporas d’influencer la politique du pays, en mesurant leur capacité à favoriser la démocratisation et à freiner le retour à l’autocratie. Deuxièmement, en s’appuyant sur les résultats préliminaires des recherches des auteurs, l’article se concentre sur le comportement des diasporas tunisiennes pendant les périodes d’ouverture et de repli démocratiques. Cela comprend les divisions politiques des diasporas, les activités de plaidoyer et de lobbying au niveau international ainsi que l’aide économique et migratoire.
Communication 3 : La guerre en République démocratique du Congo. Forces et faiblesses de l’action diplomatique de la SADC
Georges M. Mulumbeni, Université de Lubumbashi
La RDC, pays situé à cheval entre l’Afrique australe et l’Afrique centrale et membre de la SADC depuis 1998, rend difficile la réalisation des objectifs que s’était fixée cette organisation régionale dont le principal est de faire l’Afrique méridionale un espace géopolitique de paix et de sécurité afin d’obtenir un développement auto soutenu, de l’autosuffisance collective et l’interdépendance de ses Etats membres par des actions nationales et régionales.
Avec les conflits qui sont devenus, quasi permanents en RDC, la SADC peine à faire de l’Afrique australe une communauté de sécurité malgré son architecture de sécurité imposante qui commence avec la mise sur pied des mécanismes comme the Inter States Defense and Security Committee; the Inter States Politics and Diplomacy Committee ; l’Organ on Politics, Defence and Security, le Strategic Indicative Plan for the Organ et plus tard le Mutual Defence Pact.
C’est avec les mêmes mécanismes que la SADC a su débloquer la situation d’abord du Lesotho et plus tard du Zimbabwe présenté à l’époque comme un Etat en faillite ; la RDC constitue contrairement aux autres une épine difficile à extirper et rend la marche vers un progrès incertain pour les autres quatorze membres de cette organisation considérée dans le passé comme l’une des meilleures du continent africain.
En effet, même la première instance de maintien de la paix et de la sécurité internationales à savoir l’ONU malgré la création d’abord de la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC) et plus tard, la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation de la RDC (MONUSCO), est entrain de montrer ses limites quant ’au rétablissement et au maintien de la paix en RDC et dans toute la région.
À travers cette étude, nous cherchons à répondre à la question de savoir si la diplomatie de la paix et de sécurité de la SADC sera-t-elle en panne ? En d’autres termes, nous allons proposer les voies et moyens pour faire revivre le rôle qu’ont joué les pères fondateurs SADC qui avaient permis de passer de l’ordre de l’apartheid à celui d’après sans trop de casses.
P7 L’encadrement juridique de la négociation politique, gage d’amélioration et de consolidation de l’art.
20 mai 2023
9h00 – 10h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panels
Gilbert Mbassa, moderateur
Guy David Mbara A Betchem, « L’obligation de négocier dans le règlement des différents de délimitation maritime »
Geoffrey Grandjean, « Ouvrir une majorité absolue. Essai de typologie des motivations d’ouverture et de sélection des partenaires de coalitions »
Francis Edo’O Assene, « Négociation et résolution des crises socio-politiques dans les Etats d’Afrique noire francophone: cas du Cameroun »
Chokri Essifi, « La négociation socio – politique en Tunisie post-révolutionnaire : l’expérience du dialogue nationale »
La négociation semble omniprésente. Le mot est en effet utilisé pour renvoyer à des réalités parfois très différentes. Chacun négocie à longueur de journée : au sein de sa famille, avec ses voisins, avec son employeur, avec des clients ou des fournisseurs. On négocie dans sa vie privée, au travail et, d’une manière plus générale, dans son environnement social et économique. Nous sommes ainsi, tous, amenés à rechercher des accords, des arrangements, diront les plus pessimistes, acceptables par l’ensemble des parties. De manière générale, la négociation consiste à concilier des positions différentes pour adopter une seule décision conjointe et consensuelle. C’est un processus qui permet de prendre une décision en l’absence de règles mécaniques qui s’imposeraient. La négociation se distingue des autres processus de dialogue, comme la concertation ou la consultation, en ce qu’elle est un processus décisionnel. Il peut s’agir soit d’un mode de décision obligatoire en raison des règles de droit en vigueur, soit d’un mode décisionnel choisi par les parties. On peut parler de la négociation socio-économique, mais surtout politique. La négociation politique est une forme spécifique de négociation. Elle véhicule souvent des images éloignées de la réalité vécue par ses acteurs. Usuellement, le citoyen n’y accède que via les médias, qui mettent généralement en exergue les tensions entre les interlocuteurs politiques ou sociaux. Du fait de sa fondamentalité, les femmes et les hommes politiques y recourent fréquemment, afin de se positionner. Cependant, l’observation de l’actualité politique récente met en lumière un ralentissement tant de son utilisation que de sa portée. Cet état de chose est probablement causé par son caractère incertain et ses effets pervers dus à la mobilisation sans vergogne de la ruse, la violence, la déloyauté ou le mensonge.Un autre élément essentiel de la négociation politique est qu’une grande partie de celle-ci se déroule dans l’ombre, avec des personnages qui n’ont d’autre légitimité que le mandat qui leur est donné par le responsable politique. Il apparaît dès lors comme une nécessité inéluctable dans son propre intérêt de l’encadrer juridiquement. Il est important de souligner que la production normative étatique ne se limite guère à l’action législative et réglementaire. En règle générale, les activités conventionnelles constituent une part négligée de l’intervention publique. L’entreprise l’est encore plus dans le domaine politique où l’absence de règles formelles précises semble être le principe. Dans le dessein de redorer le blason de la négociation politique qui perd de plus en plus de sa superbe, il est nécessaire de la canaliser juridiquement.
P8 Le Québec en mouvement: nationalisme, souveraineté et enjeux électoraux
20 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 3452
Type d’activité : Panels
Communication 1 : Répertoire de cadres, réappropriation de cadres, et mis en scène de l’agenda dans les campagnes référendaires : le cas de la coalition contre-souverainiste au Québec.
Zheng Ying, Université des études étrangères de Tokyo
La démocratie directe devient un arrangement politique à la mode pour articuler les revendications collectives de bas en haut, laissant les peuples décider par un vote simple-oui ou non. Il est également très apprécié, surtout parmi les partis nationalistes ethniques, d’atteindre l’objectif d’indépendance avec légitimité. Cependent, est-ce toujours le cas? Pourquoi la négociation entre Québec et the gouvernement fédéral été toujours inachevé? Ou est-ce que le souverain negotiable? Cet article s’attache à montrer comment le camp du Non façonne le récit public lors des campagnes référendaires de 1980 et 1995 en se réappropriant l’impasse politique du camp du Oui. La coalition contre-souverainiste met stratégiquement en place et modifie l’agenda pro-Canada dans la lutte acharnée avec le nationalisme québécois. On examine les discours du camp de non en les catégorisant dans des cadres thématiques généralisés. De plus, il montre que les discours sont les actes politiques présentés par les acteurs politiques, en diffusant des idées fédérales pour gagner des indécis. Outre les tactiques conventionnelles de représentation négative de l’autre, de sélection des fautes et d’incitation à la peur (principalement des préoccupations financières), dans les deux référendums, la coalition contre-souverainetiste consolide les cadres fédéralistes par la réinterprétation, la réappropriation des récits de l’adversaire et la promesse d’un changement institutionnel pour appel aux électeurs indécis.
Communication 2 : Le nationalisme chez les jeunes québécois : mort ou vivant ?
Raphael Roy, Université de Sherbrooke
Le projet de recherche s’intéresse à la thématique du nationalisme au Québec et plus précisément, chez les jeunes. Le projet de recherche cherche à étudier le comportement des jeunes générations par rapport à leur sentiment d’appartenance vis-à-vis le Québec. Raphael Roy se me questionne à savoir si le nationalisme décline chez les jeunes générations et il analyse si les valeurs du nationalisme sont différentes entre les générations. On constate une certaine résurgence de cette notion dans les débats publics, à travers des partis politiques, des groupes de la société civile et de nombreux intellectuels québécois. Pourtant, plusieurs croient que le nationalisme tend à décliner
chez les jeunes générations et que l’on serait même dans une ère postnationale. Il demeure toutefois que cette appréciation du nationalisme n’a été que très peu été étudiée chez les jeunes québécois, et plus encore chez les générations Y et Z. Ce projet de recherche vise donc à examiner comment les jeunes québécois se positionnent face au nationalisme québécois et comment ils s’identifient à la question nationale. La méthodologie du projet de recherche combine un devis de recherche mixte. Dans un premier temps, Raphael Roy a mis en œuvre une méthode par sondage pour recueillir des données sociodémographiques en le partageant sur les réseaux sociaux. Il essaye de constituer un échantillon représentatif de la population, tout en essayant de respecter les caractéristiques sociodémographiques de l’ensemble de la population québécoise. Dans un deuxième temps, Raphael Roy a également réalisé des entretiens semi-dirigés pour approfondir certains angles de la recherche.
Communication 3 : Stratégies de promotion des enjeux électoraux au Québec de 2012 à 2022
Marc-Antoine Martel, Candidat au doctorat, Département de science politique, Université de Montréal.
Richard Nadeau, Professeur titulaire, Département de science politique, Université de Montréal.
L’étude des stratégies de communication déployées par les partis politiques est importante, car celles-ci ont un impact sur la conversation publique ainsi que sur l’information à laquelle les électeurs sont exposés. Au courant des dernières décennies, les médias numériques ont graduellement transformé l’environnement médiatique et les partis politiques ont dû s’adapter de façon à élaborer et diffuser des messages qui atteignent efficacement leurs publics cibles sur une diversité de plateformes de communication.
Cette recherche vise à documenter et à expliquer comment les partis politiques québécois ont façonné leurs communications dans ce contexte en mouvance. Alors que la littérature académique note que le ciblage des messages politiques est devenu une pratique courante au Québec comme dans plusieurs démocraties occidentales, peu d’analyses ont cherché à comprendre dans quelle mesure cette pratique se traduit par la promotion différenciée des enjeux en fonction des plateformes de communication.
Pour explorer la question, nous nous appuyons sur une méthode d’analyse de contenu automatisée des communications diffusées par les partis lors des campagnes électorales de 2012, 2014, 2018 et 2022. Le corpus à l’étude est constitué de communiqués de presse (N=721), de publications Facebook (N=2 007), de gazouillis (25 062) ainsi que de publicités numériques (corpus en construction) diffusés au cours des campagnes formelles. Les résultats préliminaires stipulent que, contrairement à nos attentes, les partis semblent mener des campagnes cohérentes. L’ordre du jour des partis politiques québécois n’est pas fragmenté à travers les plateformes considérées dans cette étude. Les résultats finaux pourront être présentés à l’occasion du congrès de la SQSP.
Cette recherche longitudinale offre une perspective intéressante pour comprendre l’évolution de la communication électorale lors d’une décennie marquée par la transformation numérique de l’écosystème médiatique québécois.
P9 Accords politiques et variabilité conflictuelle en République Centrafricaine: Quelles perspectives pour la paix ?
20 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Panel
Responsable du panel : Joseph Tchinda Kenfo, PhD en Histoire, Université de Yaoundé II
Co-responsable du panel : Kotty Phyonex Lontsi Djimene, Université de Yaoundé II
Devenue indépendante le 13 août 1960, la République centrafricaine est marquée par une fragilité socio-économique. Ce pays a aussi connu une instabilité politique et institutionnelle liée à l’alternance entre les coups d’État (1965, 1981, 2003 et 2013) et le pouvoir civil. Ainsi, plusieurs régimes politiques se sont succédés en Centrafrique, chacun ayant la particularité d’être subordonné au profil du dirigeant. Face à la profusion des coups d’Etat et autres mutineries et soulèvements militaires, des initiations de négociation d’accords politiques ont été amorcées, entre le gouvernement centrafricain et trois groupes armés.
C’est dans ce cadre que s’inscrivent : l’accord de Syrte (Libye) du 2 février 2007 entre le gouvernement centrafricain et le Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC), sous la médiation du colonel Mouammar Kadhafi ; l’accord de Birao du 13 avril 2007 entre le gouvernement centrafricain et l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR) ; l’accord de cessez-le-feu et de paix de Libreville, signé le 9 mai 2008 par le gouvernement centrafricain et l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD) ; l’accord de paix général (APG) conclu le 21 juin 2008 à Libreville, entre le gouvernement centrafricain et trois mouvements rebelles (APRD, UFDR et FDPC). L’APG avait bénéficié de la médiation du président gabonais, Omar Bongo Ondimba, agissant en tant que président du Comité ad hoc dans l’espace CEMAC sur les questions centrafricaines, et du Guide libyen Mouammar Kadhafi, également Haut médiateur permanent de la paix dans l’espace CEN-SAD. Plus tard, peu avant le coup du 24 mars 2013, un autre accord a été paraphé à Libreville, le 11 janvier 2013, sous la conduite du président congolais Denis Sassou Nguesso.
Ceci étant, comment les différents accords politiques en République centrafricaine sont-ils négociés et à quelles fins ? Autrement dit, sont-ils issus d’un consensus et peuvent-ils influé sur la conflictualité permanente ? Il est attendu de ce panel des propositions multidisciplinaires (histoire, science politique, droit, etc.) susceptibles de rendre compte de : l’analyse du contenu des accords politiques depuis 2008 ; les acteurs en présence ; le rôle joué par les médiateurs ; l’exécution des accords politiques ; l’incidence des accords politiques sur la conflictualité ou la paix, etc.
Communication 1 : « L’Accord de Libreville du 11 janvier 2013 et la conjoncture conflictuelle en Centrafrique »
Ibrahim Mfoundikou, Université de Yaoundé I
L’accord de Libreville du 11 janvier 2013 est intervenu après le coup d’Etat du 24 mars 2013 par lequel Michel Djotodjia, en tête de la rébellion de la Seléka, a renversé le président légitime, François Bozizé. En effet, très acculé, François Bozizé à qui la procuration sécuritaire de N’Djamena lui a été retirée, a convoqué l’interposition de la Force multinationale de l’Afrique centrale (FOMAC) et sollicité la médiation de la CEEAC. Le président congolais Denis Sassou-Nguesso, médiateur mandaté par la CEEAC, est parvenu à obtenir l’accord à Libreville. Celui-ci était paraphé par les représentants présidentiels (dirigés par Jean Willybiro Sako), les mouvements politico-militaires non-combattants (MLC et FDPC représentés par Abdoulaye Hissene), l’opposition démocratique (représentée par Nicolas Tiangaye) et la coalition Séléka (composée de la CPJP, de l’UFDR, de l‘UFR11, renforcée par la Convention patriotique pour le salut wa Kodro, CPSK, représentée par Michel Am Nondroko Djotodjia). Il s’articulait autour des clauses suivantes : le maintien du président de la République jusqu’au terme de son mandat (2016), la formation du gouvernement d’union nationale, la libération des personnes arrêtées, le retrait de la coalition Séléka des villes occupées, la dissolution des milices à travers le pays…
A l’analyse, l’accord de Libreville est certes salutaire, mais présente le défaut de prétendre solutionner politiquement un problème plutôt social. Cet accord a réussi à concilier les contrariétés liées à la légitimité contestée de François Bozizé et à l’illégalité avérée de la rébellion, mais en se préoccupant à résoudre une urgence rentière (ou alimentaire). En effet, bien qu’apprécié dans l’ensemble, l’Accord de Libreville a suscité, toutefois, des dissensions et des suspicions de part et d’autre. La coalition Séléka, soupçonnée de violer le cessez-le-feu, a accusé le camp Bozizé d’avoir torpillé les termes de l’accord de Libreville, en dépit de la formation du gouvernement d’union nationale le 3 février 2013.
La présente communication ambitionne d’analyser la spécificité et l’incidence de cet accord sur la suite des événements en Centrafrique. En quoi l’accord de Libreville est-il original ou différent des autres ? Quels acteurs ont-ils été mobilisés, quels moyens ont-ils été pourvus et qu’elle en a été la finalité ?
Communication 2 : « Gouvernance des ressources naturelles, économie de guerre et absence de consensus en Centrafrique »
Kotty Phyonex Lontsi Djimene, Université de Yaoundé II
Depuis le 24 mars 2013, date du coup d’État de la Séléka, la RCA est plongée dans le chaos. Présentée comme un État failli en treillis, un État fantôme ou un État-canon en proie à la somalisation ou au pré-génocide, la RCA convoque à son chevet, depuis plus d’une décennie, plusieurs organisations politiques (CEMAC, CEEAC, UA, UE, ONU) et humanitaires (Human Rights Watch, UNICEF, etc.). Il s’agit d’un pays qui présente une grande vulnérabilité, politique, sociale et sécuritaire. Car, on y note une dynamique de reterritorialisation avancée sous-tendue par de vastes mouvements d’immigration, des litiges frontaliers et des conquêtes de terres minières. La localisation des richesses -phénomène tout à fait naturel- et la difficulté du gouvernement central à en faire une équitable distribution, enveniment les relations intertribales. La gouvernance (politique, sécuritaire, administrative, social etc.), mal articulée depuis le retour au pluralisme politique, dans ce registre, n’est pas moins indexée comme incubateur de la violence. Les enjeux qui en découlent structurent, certainement, l’engagement des acteurs étatiques extérieurs (Afrique du Sud, Tchad, Congo-Brazzaville, Angola, etc.) et non étatiques (LRA de Joseph Kony, combattants soudanais et tchadiens).
Bien que la mauvaise gouvernance et la négation d’un État post-colonial mal articulé soient présentées comme les racines des conflits centrafricains, il est évident que la floraison des groupes armés et surtout les trafics financiers illicites en constituent la ressource. Depuis 2003, date d’entrée des rebelles de François Bozizé dans Bangui jusqu’au coup d’État du 24 mars 2013 par lequel il a été chassé par la coalition de la Séléka, la situation n’a guère changé. Plutôt, elle s’est amplifiée en se complexifiant, manifestée par la recrudescence des activités illicites, la profusion des entreprises criminelles et l’abandon des périphéries territoriales. La complexité des crises centrafricaines, depuis 2003, et la tenue de cette conférence internationale nous offre l’occasion d’établir le lien apodictique entre les richesses naturelles, les trafics illicites et la récurrence des conflits en Centrafrique. Ceci étant, comment les trafics illicites constituent-ils le facteur multiplicateur du quotient conflictuel en Centrafrique ? Comment les acteurs de ces trafics se déploient-ils et quel en est l’impact sur la stabilité du pays ?
Communication 3 : « L’économie politique du conflit centrafricain et le braconnage en Afrique centrale : cas du trafic clandestin des armes légères et munitions à la frontière Cameroun-Centrafrique (1960-2016) »
Marie Julien Danga , Ph.D en Histoire des Relations Internationales, Université de Yaoundé I
La situation sécuritaire précaire en République Centrafricaine(RCA), demeure préoccupante en Afrique centrale pour les Etats et les populations. La présente étude a donc pour objectif de montrer comment l’instabilité politique chronique la RCA est responsable l’instabilité dans la région. Cette crise sécuritaire est tributaire de plusieurs facteurs à savoir : la porosité frontalière, l’insécurité et le grand-banditisme, les dynamiques guerrières entre factions rebelles de la Séléka et anti-Balaka. Cet ensemble d’éléments concourent à une forte dissémination non-licite des flux importants d’armes légères de petit calibre, des munitions et des ressources aurifères, diamantifères, la décimation de la faune sauvage et des bois tropicaux entre les frontières terrestres et maritimes du Cameroun et la Centrafrique d’une part et l’Afrique en général. Cette situation amplifie la criminalité transnationale, la fabrication locale des fusils. L’architecture des armes légères porte sur les Fusils Automatiques Légers (FAL), Pistolets Mitrailleurs, des Fusils AK-47 Kalachnikov, fusil de chasse calibre 12 et des munitions de toutes catégories. Plusieurs pays sont signalés comme étant le point de départ de ce transfert illicite à partir de la Chine, l’Iran, le Soudan, le Tchad, le Cameroun. Une économie du crime, adossée sur la contrebande, la contrefaçon et une militarisation accrue profitable aux différents régimes politiques et groupes armées non-étatiques qui ont succédé à la tête de ce pays. Tout ceci est possible à travers une exploitation combinatoire des sources primaires (archives, données orales), et des sources secondaires comprenant : mémoires, thèses, articles. Le constat est clair, que la frontière RCA-Cameroun est le terreau d’une forte circulation non légale des armes, munitions des drogues, de la prédation des richesses du sous-sol œuvres des groupes armés. Le braconnage politique, une exploitation anarchique des bois tropicaux aux essences rares et prisées et la décimation de la faune sauvage dans les aires protégées accentuent la paupérisation et la criminalité transnationale en RCA. Il est important de désarmer et initier des politiques publiques favorables à la réforme du secteur de sécurité
Communication 4 : « L’Accord politique pour la paix et la réconciliation (6 février 2019) : Quelles perspectives de paix en République Centrafricaine ? »
Alphonse Tamekamta Zozime, Ph.D. en Histoire des relations internationales, Université de Yaoundé I
Depuis le 15 mars 2003, l’État peine à s’articuler et à exister. Au gré des saisons politiques, l’accalmie et les bruits de bottes s’alternent et rythment les séquences conflictuelles. Le dialogue politique, conçu autour des multiples accords (Syrte en février 2007, Birao en avril 2007, Libreville en mai 2008, Libreville en juin 2008, Libreville en janvier 2013 etc.) et des Résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, décrispe difficilement l’atmosphère. C’est pour cela que les tensions, entre groupes armés non-étatiques concurrents et entre ceux-ci et l’armée régulière, constituent le principal obstacle à la sécurité, à la stabilité et la paix durable dans ce pays.
Depuis le 6 février 2019, la signature de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation (APPR), encore appelé Accords de Khartoum, est en vigueur. Celui-ci a été signé, sous l’égide de l’Union africaine (UA), des Nations unies et de partenaires internationaux, à Bangui entre le gouvernement et les quatorze (14) groupes armées qui sévissent dans le Nord, le Nord-ouest, l’Est et le Sud-Est de la RCA. Structuré en en onze (11) points et comportant quinze (15) articles, l’APPR résume non seulement les points essentiels pour un retour durable à la paix en République centrafricaine, mais aussi et surtout, il évoque l’urgence de l’éradication de toute velléité d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État.
Quatre ans après cet accord, malgré l’existence du Programme nationale de désarmement, démobilisation, réinsertion et rapatriement (PNDDRR), les exactions continuent et la sécurité demeure incertaine. Ce congrès annuel offre l’occasion de se pencher sur le contenu et la mise en application de l’APPR. De même, il est question d’évaluer la contribution cet accord au retour de la paix en Centrafrique.
P10 La régionalisation avancée comme alternative aux accords politiques: Cas du Sahara marocain
20 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panel
Responsable du panel : Alphonse Zozime Tamekamta, Université de Yaoundé 1
Co-responsable du panel : Cherif Soulemane Sankara Nchouwat, Université de Yaoundé I
Le Nouveau Modèle de Développement pour les provinces du Sud (NMDPS) du Royaume du Maroc, conçu et négocié en 2012, est le document-cadre s’inscrivant dans le grand projet national de régionalisation avancée. Il s’agit du cadre programmatique et pragmatique du Plan d’autonomie des provinces du Sud (menacé par le séparatisme du Polisario), appuyé par l’ONU depuis 2007. Dans ce sillage le NMDPS dégage une exemplarité en rapport non seulement aux enjeux de renouvellement de la pensée africaine en terme de négociation politique, mais aussi et surtout une convergence acceptable des points de vue entre le pouvoir central (royal) et les régions du Sud du Royaume, dans le cadre d’un développement accéléré. Pour cela, le NMDPS est adossé sur quatre principes-directeurs : la création d’une nouvelle dynamique de croissance et des pôles de compétitivité régionaux; la promotion d’un développement humain inclusif et la valorisation de la dimension culturelle; le développement et l’aménagement territorial durables; une gouvernance responsable au service de la confiance et de la démocratie. A l’échelle transnationale et sous-régionale, le NMDPS présente la particularité de tenir compte des enjeux d’intégration inter-saharienne et interafricaine. Car, en privilégiant le désenclavement des provinces du Sud avec priorité à la connectivité des régions du Sud pour favoriser leur intégration réussie dans le vaste bassin économique maritime (allant de la côte nord du pays à celle de l’Afrique de l’Ouest et des îles Canaries), le NMDPS permet de remplacer progressivement la dangereuse dyade géopolitique Afrique-blanche-Afrique noire par un espace aux continuités économiques et culturelles avantageuses.
Ceci étant, comment le NMDPS a-t-il été négocié et s’exécute-il au regard des exigences de paix, de stabilité et de développement local et national du Maroc ? Quels enjeux et leçons peuvent-ils être tirés et capitalisés pour optimiser la nouvelle pensée africaine du développement local inclusif à travers le renouvellement de la négociation politique?
Il est attendu dans ce panel, des propositions multidisciplinaires ancrées dans une analyse portant éventuellement sur : l’érection des profils de marginalisation et les clivages politiques dans le Sud du Maroc ; les modalités, les acteurs et le contenu des négociations en vue de la mise en place du NMDPS ; les ententes stratégiques et leur impact, etc.
Communication 1 : « Nouvelle approche du développement au sud du Maroc et récentes péripéties de la géopolitique régionale et internationale »
M’hammed Belarbi, Enseignant-chercheur, Université Cadi Ayyad (Faculté de droit de Marrakech-Maroc)
Alors que les tensions intermaghrébines engendrées par le conflit saharien sont d’autant plus complexes qu’il a d’importantes résonances sur la politique intérieure des États, les provinces du sud du Maroc ont connu un grand progrès et un développement incessant.
Certes, le dossier du Sahara représente en effet une des dernières cartes d’Alger pour limiter la puissance et l’influence du Maroc dans la région. La ligne tenue par l’Algérie dans son soutien au Polisario pourrait donc être un facteur de complication dans la résolution du conflit sahraoui, avec toutes ses incidences sur la gestion des questions sécuritaires, économiques et diplomatiques pour lesquelles la coopération régionale est un élément primordial. Hormis l’incompatibilité des positions respectives entre les principaux protagonistes, les raisons actuelles de l’enlisement du conflit sont à connecter à des questions plus larges de géopolitique régionale et internationale qui impliquent à divers échelles l’Algérie, la France, l’Espagne, les États-Unis et l’ONU.
Toutefois, le Maroc est actuellement en position de force dans les négociations à venir. Non seulement la position marocaine est encouragée par un soutien externe, mais parce que l’Etat marocain a consolidé sa présence en termes de développement de ses territoires méridionaux. Après une préparation très minutieuse, le Maroc propose à la communauté internationale un projet d’autonomie territorial afin de résoudre le conflit saharien. La régionalisation avancée adoptée par le Maroc constitue un complément jumelé de l’offre politique et du nouveau modèle de développement pour les provinces du Sud.
Communication 2 : « La Marche Verte, la monarchie, le religieux et le peuple »
Yassine El Yattioui, Doctorant en Science Politique et Relations Internationales à l’Université de Salamanque (Espagne) et Secrétaire général de NejMaroc (Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation)
Le 6 novembre 1975, un cortège de 350 000 Marocains s’ébranle dans le désert pour une marche qui durera plusieurs jours. « Cela correspond au nombre de naissances annuelles au Maroc, a expliqué le roi Hassan II. J’ai pensé qu’il m’était permis d’engager la moisson solennelle que Dieu nous donne pour ramener à la Patrie une terre que nous n’avons jamais oubliée. ». Le souverain chérifien entend libérer le Sahara occidental de la présence espagnole, comme l’avait promis son père au lendemain de l’indépendance du Maroc. La Cour de justice de La Haye s’est prononcée sur les arguments présentés par Rabat. Le tribunal international confirme l’existence de liens unissant certaines tribus sahraouies au royaume marocain avant la conquête espagnole de 1884, mais affirme que le droit à l’autodétermination doit prévaloir. Couvrant la voix du tribunal international, des centaines de véhicules acheminent vers les provinces du Sud les tonnes de matériel et de vivres nécessaires à l’opération.
Trains, avions et navires participent au ballet logistique. Le 6 novembre, la Marche Verte est lancée : les 350 000 marocains de cette armée pacifique s’élancent dans le désert embarqué à bord de milliers de cars et de camions pour une démonstration qui durera jusqu’au milieu du mois. Des portraits du monarque marocain, qui a volontairement placé la Marche sous les couleurs de l’islam, et des milliers de Corans sont brandis par la marée humaine.
La Marche Verte prend sa signification et son importance, non seulement en raison de son organisation maîtrisée, ou encore de sa signification politique profonde, mais aussi de cette ferveur nationale qui a découlé de toutes les provinces du Maroc. Elle s’est articulée sur l’unité nationale et la ferveur islamique qui constituent, ce qui fait d’elle un moment d’expression populaire. Elle a été aussi un moyen de pression pacifique envers le régime franquiste et dans une vision plus large, envers la Communauté Internationale.
Afin de confronter réellement une vision d’un spécialiste de la question et un participant de la Marche Verte, nous avons opté pour la même grille d’entretien lors de nos entrevues avec Karim Chihi (doctorant en sciences islamiques à l’Université de Lyon) et Dr Mohamed Badine El Yattioui (docteur en Relations Internationales et professeur d’université à l’American University of Emirates de Dubai).
Communication 3 : « L’Agence du Sud et le décollage économique du Sahara marocain : quand les actions remplacent les accords politiques »
Mbouombouo Pare Mamouda, Université de Yaoundé I
L’Agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du sud du Royaume (APDS), régulièrement appelé Agence du Sud, a été créée en 2002. Il s’agit d’une formule originale, initiée par les autorités marocaines, pour asseoir les jalons concrets d’une dynamique réelle de développement durable sous la forme d’un établissement public dont le périmètre d’intervention couvre les 9 provinces (3 régions) qui constituent les provinces du Sud du Royaume. La création de cette Agence est intervenue dans un contexte marqué par la montée d’une frange minoritaire de contestataires de l’intégrité territoriale du Royaume, sous les auspices du Polisario.
Dans le souci de créer une saine émulation entre les autorités et le peuple, au-delà de possibles accords politiques, l’Agence du sud a opté pour un processus de proximité avec la population selon une formule de développement territorial intégré d’une part et suivant une logique partenariale avec tous les acteurs de développement local concernés par la mise en œuvre d’une politique déconcertée.
Compte tenu de l’efficacité des actions menées par l’Agence du sud en lien avec le développement autocentré, il est indéniable qu’elle constitue un levier fondamental susceptible de juguler toute velléité contestataire dans le Sud du Maroc. Ainsi, comment l’Agence du sud opère-t-elle la mue socioéconomique dans les provinces du sud du Maroc ? Dans quel sens peut-elle être considérée comme une alternative crédible à tout accord politique ?
Communication 3 : « Le Nouveau modèle de développement pour les provinces du Sud (NMDPS) : contours d’un programme à enjeu réconciliateur »
Alphonse Tamekamta Zozime, Université de Yaoundé I (ENS)
Le 6 novembre 2012, dans son discours à l’occasion de la fête de la Marche Verte, le Roi Mohammed VI confiait au Conseil économique, social et environnemental la mission d’élaborer un Nouveau modèle de développement pour les provinces du Sud (NMDPS). Dans le cadre de la mise en œuvre des instructions royales, un travail d’évaluation complet avait été fait. Il en était ressorti que les provinces du Sud, figurant parmi les déserts les plus arides de la planète, représentent 59% du territoire national et comptent 1 028 806 habitants ; soit 3,2% de la population du Royaume. Aussi, y avait-on remarqué un taux d’urbanisation, le plus élevé du Royaume, oscillant autour de 74%, largement supérieur à la moyenne nationale qui était de 60%. De même, le constat de l’insuffisance des opportunités d’emploi avait également été fait. Car, le niveau de chômage y était élevé (15% contre 9% pour la moyenne nationale) et les jeunes (28%), les diplômés du supérieur (41%), et les femmes (35%) étaient les plus exposés. C’est au cœur de ce défi économique et social que s’inscrit le NMDPS. Ce dernier est conçu comme un pilier d’appui pour l’insertion définitive de ces provinces dans la patrie unifiée, et pour le renforcement du rayonnement du Sahara, comme centre économique et comme trait d’union entre le Maroc et son prolongement africain, par la réalisation de grands chantiers et de projets sociaux et médico-éducatifs. Ceci étant, comment s’articule et s’exécute le NMDPS ? Quels enjeux et leçons peuvent-ils être tirés et capitaliser pour optimiser la réconciliation, la paix et le développement local inclusif dans les provinces du Sud?
P11 : L’action collective face à l’État : entre crise et mobilisation
20 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panels
Communication 1 : Sur la socialisation politique par l’engagement
Olivier Sabourin, Étudiant au doctorat à l’Université de Montréal
Des décennies après un événement, que deveniennent ses acteurs? Quels sont les effets de la participation à une crise politique sur un parcours de vie? Ce panel répond à ces réflexions à partir du cas de la résistance à Kanehsatake de 1990 (crise d’Oka).
Le matin du 11 juillet 1990, la rupture surprend à Kanehsatake. La résistance des gens de la communauté au projet de développement de la municipalité d’Oka prend une charge symbolique décisive lorsqu’une fusillade entre la Sûreté du Québec et des Warriors mène à la mort d’un agent de la SQ. La conjonction de la fusillade à Kanehsatake au blocage du pont Mercier inaugure une crise politique qui marquera durablement les relations entre les gouvernements et les peuples autochtones, mais qui affectera d’abord et avant tout ceux et celles qui ont vécu l’événement.
L’analyse des transformations suscitées par les événements constitue une part importante de l’apport d’intelligibilité qu’offrent les sciences sociales à l’étude des phénomènes politiques. Il s’agit de voir la mobilisation comme un processus de politisation qui transforme les protagonistes par une modification dans la conscience spécifique de la cohorte qui a vécu l’événement (Ihl, 2002). Cependant, l’étude des effets socialisant des événements politiques demeure à développer (Fillieule et Neveu, 2018). Cette activité répond à ce manque dans la littérature sur la socialisation par l’engagement.
L’analyse des parcours de vie des acteurs autochtones de la résistance à Kanehsatake de 1990 permettra de retracer des sentiers qui mènent à l’événement et qui sont suivis suite à son occurence. La compréhension des parcours de vie passe par l’élaboration d’une théorie de la scalarité des identités qui permet de rendre compte des effets socialisants de la participation politique.
La territorialité fait partie intégrante des luttes politiques autochtones. Cependant, la sociologie des mouvements sociaux tend à oublier que l’action se déroule toujours quelque part et que ce lieut peut « représenter l’enjeu même de la mobilisation (Combes, 2011) ». Pour pallier à cet angle-mort, il faut construire la compréhension d’un système identitaire qui représente scalairement les identités qui composent chaque individu. C’est à travers la notion de proximité (sociale, territoriale et notamment culturelle) que l’on peut comprendre comment un individu se représente face au monde. La scalarité de ce système identitaire suit une échelle inter-reliée qui trouve son noyau au niveau local, ensuite régional, pan-régional et finalement parapluie.
On verra qu’en contexte de colonialisme, participer à une crise politique tend à minimalement renforcer les identités mobilisées pour résister et parfois à expandre les identités mobilisatrices. Même pour les acteurs les plus réticents à s’engager dans la résistance de 1990, cette participation a pour effet de renforcer le lien au territoire et à la nation Mohawk plus généralement. La plupart des parcours de vie s’inscrivent sous le signe de la continuité des mobilisations politiques. Chez certains acteurs, on voit plutôt une augmentation de la scalarité de la participation vers des causes non seulement adjacentes aux mobilisations pre-1990, mais qui constituent une expansion vers des causes scalairement plus éloignées comme les droits autochtones globaux.
Communication 2 : Mobilisation contre les mesures d’austérité au Québec : Le cas des services de garde à l’enfance
Émilie Lessard-Mercier, Université Laval
La mise sur pied du réseau des Centres de la petite enfance (CPE), en 1997, fait suite à de nombreuses mobilisations de la part des éducatrices du milieu des services de garde à l’enfance, des groupes alliés et des parents. Bien que l’intensification de l’application de politiques néolibérales à partir du milieu des années 1990 (Arsenault, 2018) situe l’adoption de la Politique familiale de 1996 à l’intersection des luttes sociales menées à cet effet par des groupes sociaux depuis les années 1970 (Desjardins, 2002 ; Lalonde-Graton, 2002) et de l’adoption de politiques d’activation du marché de l’emploi québécois (Boucher & Noiseux, 2018), les objectifs de cette politique étaient clairs : offrir une place à contribution réduite à l’ensemble des enfants du Québec.
Le réseau des CPE qui est alors mis sur pied offre l’accès universel à des services de garde, moyennant une contribution parentale de 5$ par jour, par enfant. Celui-ci se retrouve très rapidement mis à mal par le Parti libéral du Québec qui prend le pouvoir en 2003 et qui accélère le virage néolibéral déjà bien entamé, augmentant d’abord la contribution parentale à 7$ par jour, malgré une forte contestation de la part des groupes sociaux alors organisés sous forme de coalition (Bellemare, 2006). Par la suite, ce même parti politique adopte, en 2015, une indexation annuelle du tarif de base en plus d’une contribution financière additionnelle modulée en fonction du revenu des parents, alors qu’en parallèle, le réseau privé des services de garde à l’enfance croît de manière exponentielle, encouragé par de généreux crédits d’impôt.
En étudiant la manière dont les éducatrices œuvrant en CPE et leurs allié.es se sont organisées face aux mesures d’austérité en 2014-2015, l’objectif de cette présentation est de déterminer dans quelle mesure cette mobilisation s’est avérée efficace et quel y est l’apport de leurs allié.es. Il s’agit de documenter ce phénomène à travers un cadre théorique basé principalement sur la théorie des ressources de pouvoir telle qu’élaborée par Walter Korpi (1998, 2006) et reprise par Friedrich Schmalz et ses collègues (2018). Toutefois, étant donné les limites de cette théorie et la composante de travail de soin (care), notre cadre théorique est complété par l’ajout d’une dimension de genre qui trouve sa source dans les écrits d’autrices féministes matérialistes (Delphy, 2013; Kergoat, 2010 et Scrinzi, 2008).
Enfin, les luttes menées par les éducatrices ont visé autant la mise sur pied d’un réseau public et sa défense une fois en place que la reconnaissance de leur travail et l’obtention de conditions de travail et d’emploi décentes. C’est pourquoi la question de la mobilisation de ces travailleuses touche plusieurs axes d’action complémentaires dans leurs négociations avec l’État.
Communication 3 : Vingt ans de consultations publiques : présentation d’un corpus original sur la parole citoyenne montréalaise de 2002 à 2022.
Louis-Robert Beaulieu-Guay, Centre de recherches interdisciplinaires en études montréalaises – Université McGill
La pertinence de la consultation des parties prenantes dans l’élaboration ou la mise en œuvre des politiques publiques est soutenue à plusieurs niveaux. Elle est notamment mise de l’avant par les meilleures pratiques administratives et les tenants de la démocratie délibérative. Ces derniers défendent l’existence d’un savoir citoyen et d’un « savoir usage » qui serait trop souvent ignoré par les décideurs. Ils proposent donc l’élargissement de la prise de décision à l’ensemble de la population. La participation des citoyens permettrait à un registre plus vaste de valeurs et de considérations de peser dans la balance lorsqu’une décision est prise et ainsi générer des politiques plus réfléchies et mieux adaptées à certaines problématiques complexes, telles que la protection environnementale et la gouvernance locale.
Cependant, au niveau empirique, l’efficacité des consultations publiques, et de ses modes de fonctionnement, est fréquemment remise en question. Que ce soit dû au risque de capture des consultations par les intérêts les mieux organisés, à leur instrumentalisation à des fins symboliques, à la perception des participants d’avoir peu d’impact, ou encore à la capacité variable des intervenants à se rendre crédibles, la validité des consultations publiques est contestée. De plus, même au niveau municipal où les consultations sont accessibles et où le niveau de participation est généralement élevé, elles ne répondent pas nécessairement à leurs objectifs ou aux attentes des participants.
Le présent projet se penche sur cette dualité et cherche à faire le bilan des 20 ans d’activités d’une des institutions de consultation publique les mieux établies au Canada, c’est-à-dire l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM). Cette contribution présente un corpus original rassemblant et organisant la documentation produite et recueillie par l’OCPM depuis sa création. Ces données regroupent les recommandations articulées par l’OCPM dans le cadre des consultations publiques initiées par la Ville de Montréal, les mémoires et les commentaires des participants sur les projets proposés, ainsi que les transcriptions des sessions en assemblée consultative. Les processus consultatifs de l’OCPM comprennent plusieurs dispositifs participatifs, y compris des consultations en ligne, des forums et des assemblées citoyennes.
La valeur des données de l’OCPM a déjà été reconnue lors du colloque marquant les 20 ans d’existence de l’organisme, mais le potentiel de ces données reste encore largement inexploité. Le présent projet cherche à démontrer les applications possibles des données textuelles de l’OCPM et leur capacité à informer les différentes questions de recherche émanant de la littérature sur les consultations publiques. Une première analyse exploratoire du corpus permet d’identifier les principaux thèmes qui ont été portés par la parole citoyenne. Cette analyse, mobilisant les techniques de structural topic modeling, met en lumière comment les thématiques du discours citoyen ont évolué à Montréal depuis 2002.
P12 Le Canada et le Québec face à la concurrence entre grandes puissances
20 mai 2023
16h00 – 17h30
Salle : LAU 1415
Type d’activité : Panels
Communication 1 : Antiaméricains, anti-impérialistes, antimilitaristes ou internationalistes ? La couverture médiatique québécoise de la guerre en Ukraine
Stéphane Roussel, ÉNAP
Jean-Christophe Boucher, University of Calgary
Justin Massie, Université du Québec à Montréal
Le 23 février 2022, l’Assemblée nationale du Québec adoptait une motion affirmant « sa solidarité avec le peuple ukrainien », soutenant « le droit du peuple ukrainien de vivre dans un pays en paix, prospère et souverain » et exprimant « son souhait d’une résolution pacifique basée sur la négociation et le respect du droit international. » Dans sa déclaration à l’appui au dépôt de la motion, le député de Québec solidaire Andrès Fontecilla apportait une nuance à l’élan de solidarité du Québec, soutenant que « le Québec doit être un acteur de la paix et non pas jeter de l’huile sur le feu, s’élancer dans une surenchère militariste. » D’autres pourfendeurs du soutien militaire à l’Ukraine dans sa résistance contre l’envahisseur russe ont invoqué la responsabilité de l’OTAN dans la guerre, le caractère fasciste du régime ukrainien, la légitimité d’une sphère d’influence russe en Ukraine, ou encore la volonté des États-Unis d’imposer leur hégémonie économique néolibérale.
Ces voix hostiles au soutien apporté par l’Occident à l’Ukraine sont-elles minoritaires au Québec ? Qu’est-ce qui motive les positions de ceux qui refusent de fournir aux Ukrainiens les moyens qu’ils réclament afin de préserver leur auto-détermination et intégrité territoriale ? Cet article analyse de manière rigoureuse la couverture médiatique au Québec de la guerre en Ukraine entre février 2014 et février 2022 afin de mieux comprendre l’ampleur et la nature de l’opposition à la solidarité envers l’Ukraine ou, dit autrement, aux partisans de concessions territoriales à l’envahisseur russe. Sur la base du concept de culture stratégique, nous procédons à une analyse de contenu automatisée des principaux médias québécois. Afin de discerner les particularités du mouvement pro-russe au Québec, nous comparons la représentation de la guerre dans les médias québécois francophones avec les médias québécois anglophones, les médias canadiens anglophones et les médias canadiens francophones. Plus spécifiquement, nous soumettons à la vérification empirique quatre hypothèses communément avancées afin de comprendre les propriétés des attitudes québécoises à l’égard des enjeux de défense, à savoir l’anti-américanisme, l’antimilitarisme, l’anti-impérialisme et l’internationalisme. Ces deux dernières hypothèses représentent des possibles motivations du soutien à la cause ukrainienne en pourfendant l’impérialisme russe et en soutenant le droit international. Les deux premières hypothèses représentent quant à elles de possibles motivations pour cautionner l’agression russe, soit en décriant l’impérialisme états-unien, soit en affichant un sentiment de neutralité face à ce qui n’est pas considérée comme « notre » guerre afin de justifier des concessions territoriales ukrainiennes. L’article vérifie chacune de ces hypothèses et examine leur prégnance relative dans les médias québécois depuis 2021. Il conclut avec des considérations sur l’avenir du soutien québécois au peuple ukrainien et les particularités de la culture stratégique québécoise.
Communication 2 : La Stratégie du Canada pour l’Indo-Pacifique : opportunisme économique ou symptôme de la nouvelle guerre froide ?
Maxim Chemarin, Université de Sherbrooke
Serge Granger, Université de Sherbrooke
La nouvelle stratégie du Canada pour l’Indo-Pacifique n’est pas qu’une simple négociation politique mais bien un réalignement majeur qui modifie les relations extérieures du Canada. Dans cet environnement géopolitique global laissant présager une nouvelle guerre froide 2.0, la position plus ferme du Canada face à la Chine évoque par le renforcement de ses alliances en Indo-Pacifique à travers cinq objectifs principaux (promouvoir la paix, la résilience et la sécurité, accroître les échanges commerciaux, investir dans les gens et s’affirmer comme un partenaire actif et engagé dans l’Indo-Pacifique) définit ses priorités et son engagement en Indo-Pacifique. Comme l’aurait fait un livre blanc, cette stratégie canadienne permet d’exposer la voie que le pays souhaite emprunter dans les prochaines années. Qui plus est, l’annonce de la stratégie Indo-Pacifique s’accompagne d’une relance canadienne des négociations commerciales avec les États de la région Indo-Pacifique.
La trajectoire annoncée du Canada dans sa politique Indo-Pacifique vise un multialignement avec des partenaires autres que la Chine, mais que nous révèlent les chiffres des échanges économiques ? Un désengagement envers la Chine est-il envisageable ? Est-ce que la politique Indo-Pacifique du Canada découle de l’agenda géopolitique des États-Unis ? Est-ce que l’Inde supplante la Chine dans la croissance des échanges depuis cette nouvelle guerre froide 2.0 ?. Ainsi nous nous demandons si la stratégie en Indo-Pacifique canadienne répond davantage à des besoins géopolitiques plutôt qu’économiques ?
Pour répondre à cette question, nous proposons d’analyser les échanges économiques des dix dernières années du Canada avec les cinq plus grandes puissances économiques de l’Indo-Pacifique (Chine, Inde, Corée du Sud, Japon et Australie) afin de démontrer si le discours canadien correspond aux désirs évoqués dans sa politique Indo-Pacifique. Ensuite, le contexte géopolitique sera évoqué pour expliquer les contraintes potentielles lors de négociations politiques. Au terme de cet examen, nous espérons être en mesure de mieux comprendre les motifs de cette décision canadienne d’émettre une politique Indo-Pacifique.
Tables Rondes
TB1 Mémoires politiques : l’auteur-participant- observateur rencontre la critique. Une table ronde
19 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Table ronde
Modératrice : Lisa Birch, Université Laval
Henry Milner, Université de Montréal
Guy Laforest, ÉNAP
Réjean Landry, Université Laval
Certains s’engagent dans la politique, d’autres l’observent : Henry Milner est un des rares à avoir connu les deux expériences. Au fil des pages de son mémoire publié en 2022, cet universitaire partage son vécu d’étudiant et de militant au sein des groupes communautaires à Montréal jusqu’à son rôle de stratège anglophone au cœur du Parti québécois et de promoteur de réformes en éducation et de nos institutions politiques, notamment la réforme du système électoral. Pendant plusieurs décennies, il avait l’opportunité d’observer de très près la vie politique québécoise et la pratique de la social-démocratie en Scandinavie et ailleurs.
Esquisse de l’itinéraire de l’auteur-participant-observateur de la vie politique québécoise, le récit d’Henry Milner reflète le vécu politique des générations qui ont atteint leur maturité dans les années 1960 et 1970. Par les succès et les échecs décrits dans son récit, Milner espérait éclairer les générations d’aujourd’hui et les inspirer à contrer les menaces contemporaines du populisme et de l’autoritarisme.
Lors de cette table ronde présidée par Lisa Birch, Jean-Pierre Charbonneau, Réjean Landry, Henri Milner, Guy Laforest échangeront sur les mouvements de réforme en éducation, le nationalisme Québécois et son évolution, l’histoire du Parti Québécois, les modèles sociaux-démocrates à l’ère de la montée de populisme ainsi que la réforme de nos institutions parlementaires et de l’importance des produire des mémoires des participants/observateurs de cette période foisonnante de changement au Québec.
TB2 Justice climatique: enjeux et défis
19 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Table ronde
Honorable Sénatrice Rosa Galvez
Léa Pelletier-Marcotte, Analyste politique à Oxfam-Québec
Laurent Lauzon-Rhéaume
Animée par Luz-Marina Cabrera-Suarez, étudiante à l’Université Laval en développement durable
La justice climatique recadre l’urgence climatique non seulement comme une question physique ou environnementale, mais aussi comme un problème sociopolitique. L’implication du secteur gouvernemental dans la justice climatique est essentielle pour garantir que toutes les voix et visions des différents acteurs soient prises en compte afin de créer des solutions durables, efficaces et justes aux conflits environnementaux.
« La gouvernance peut être conçue comme la capacité à poursuivre le bien commun sans nécessairement avoir l’autorité pour l’imposer » (Le Prestre, Gouvernance internationale, 2015). En termes de protection de l’environnement, elle prend une figure nécessairement universelle, puisque nous partageons tous la même planète, basée sur des efforts conjoints à travers des accords intergouvernementaux et des actions unilatérales ayant un impact supra-étatique.
Selon Le Prestre, l’émergence des organisations intergouvernementales (OIG) et l’apparition d’institutions telles que le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) ont favorisé la « construction de nouvelles constellations d’«intérêts» et le développement de nouvelles formes de régulations transnationales ». « La gouvernance internationale de l’environnement (GIE) engage à la fois, les acteurs étatiques et non étatiques » (Le Prestre, Gouvernance internationale, 2015). Dans ce cadre de gouvernance mondiale, on retrouve souvent l’exécutif au-dessus du pouvoir politique, mais au service du pouvoir économique des multinationales, qui sont coupables en grande partie sur l’aspect des catastrophes écologiques que nous connaissons.
Cette dualité éthique de l’objectif monétaire des gouvernements au service des intérêts des multinationales détériore les conditions de l’environnement et des communautés les plus pauvres (Guay, 2021). Un symptôme de cette dernière est représenté, par exemple, par la disparité entre le PIB et l’indice de développement humain (IDH), où la performance économique de certains pays ne représente pas nécessairement l’équité de conditions de vie décentes pour tous leurs habitants. Comment ce pouvoir des organisations privées qui s’impose avec ses intérêts dans la gouvernance internationale de l’environnement (GIE) au détriment des conditions de vie des populations peut-il échapper à tout cadre normatif?
Le Prestre précise la notion de gouvernance du point de vue de l’encadrement normatif de la protection de l’environnement comme l’expression d’une politique de gestion visant à affecter les acteurs plutôt qu’à appliquer des actions coercitives drastiques. En conséquence, les efforts des institutions internationales sont plutôt faibles face aux prédateurs économiques transnationaux, et leurs approches de la protection de l’environnement produisent des résultats insuffisants.
Dans cette table ronde, nous discuterons en profondeur du rôle de la participation des parties prenantes (gouvernement, dirigeants, professionnels, population affectée, etc.) dans les processus de prise de décision et de l’intégration de leurs expériences dans le développement d’actions et de politiques liées à la justice climatique.
Ateliers
A1.1 Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances
19 mai 2023
9h00 – 10h30
Salle : LAU 3452
Type d’activité : Atelier
Comité d’organisation :
Émilie Bernier, Université d’Ottawa
Éléonore Paré, Université d’Ottawa
Dimitri M’bama, Université de Montréal
Panel 1 : L’urgence de l’abolitionnisme. Ce que l’abolitionnisme pénal doit à la pensée radicale noire
Abolition du capitalisme racial!, Françoise Vergès
Introduction de l’atelier
La pensée politique noire connaît un renouveau important dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, alors qu’une nouvelle génération d’intellectuel.le.s proposent d’analyser la fondation et l’évolution de la société nord-américaine comme étant essentiellement basée sur une guerre faite aux peuples noirs (Coates, 2015). Loin de prendre fin avec l’abolition de l’esclavage en 1865 aux États-Unis, cette guerre pour le contrôle de la force de travail de la population noire et en vue d’en détruire le pouvoir social se poursuit depuis, à différentes intensités. Les deux dernières années ont toutefois été marquées par une contre-offensive impressionnante, que l’Amérique n’avait pas vue depuis les années 1960, voire 1860 (Kelley, 2020). Loin d’exprimer un désir d’intégration à la société blanche et capitaliste, la colère noire qui retentit aujourd’hui exige l’abolition de toute violence faite aux Noir.e.s, et plus spécifiquement de la police et de la prison, instruments de ce qu’ils et elles nomment, depuis que Cedric Robinson (2020[1983]) en a popularisé la notion, le « capitalisme racial ».
Si les sociétés nord-américaines estiment avoir fait du progrès dans la lutte contre le racisme, suggère Angela Davis (2003), c’est que celui-ci s’exerce désormais à l’abri des regards, derrière les murs des prisons. Aux États-Unis, au début des années 2010, une personne sur 100 vivait dans une cage (Wilson Gilmore, 2012). Du nombre total de détenus, environ la moitié sont des personnes noires, qui représentent pourtant un peu moins de 15% de la population. La thèse d’un complexe carcéro-industriel, construit sur la base du complexe militaro-industriel et fonctionnant en symbiose avec ce dernier, s’est imposée pour rendre compte de cette hausse fulgurante de l’incarcération, alors que toutes les évidences montrent que la criminalité va pourtant en diminuant. Cette explication permet à certain.e.s d’attirer la faveur de l’opinion publique et de construire la solidarité avec les détenu.e.s autour de l’idée que ces personnes, racisées en grande partie, sont en réalité innocentes, comme l’ont été tant de victimes de violences policières. Or, dans une perspective abolitionniste, cet argument est contre-productif. Il favorise une sympathie toute libérale pour une certaine catégorie de victimes ou de détenu.e.s, ceux et celles qui ne poseraient pas de réelle menace à la société blanche (Wang, 2018). Individualisant l’acte de brutalité subi (ou la criminalisation), une telle stratégie laisse intacts les cadres d’intelligibilité qui ont favorisé depuis des siècles l’adéquation entre la race noire et la culpabilité (Butler, 1993; Dorlin, 2017). Il faut donc y lire un dispositif de désarmement des mouvements de résistance au capitalisme racial et de neutralisation de la colère noire.
Cet atelier propose de réfléchir à l’importance de ces nouvelles « classes dangereuses » pour l’Amérique contemporaine à partir de perspectives politiques, juridico-légales, historiques, socio-anthropologiques, littéraires ou artistiques. Pourront être abordés: l’instrumentalisation de la colère et/ou de la révolte, les rapports qu’entretiennent la résistance noire et la résurgence autochtone, la violence sexiste au cœur du capitalisme carcéral, les figures féminines de la lutte pour l’égalité raciale, la création d’un imaginaire abolitionniste et la littérature carcérale d’hier à aujourd’hui.
A1.2 Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances
19 mai 2023
11h00 – 12h30
Salle : LAU 3452
Type d’activité : Atelier
Comité d’organisation :
Émilie Bernier, Université d’Ottawa
Éléonore Paré, Université d’Ottawa
Dimitri M’bama, Université de Montréal
Panel 2 : Racisme structurel et violences policières : la démocratie libérale et ses appareils de contrainte
Le capitalisme racial et le mythe de la solidarité blanche, Émilie Bernier
Repenser les inégalités raciales dans le complexe industriel carcéral canadien à travers le contrat racial de Charles W. Mills, Louis Pierre Côté
Perspectives critiques intersectionnelles des origines de la police en Amérique du Nord Francis Dupuis-Déri
Qu’est-ce qu’un gang ? Ted Rutland
La pensée politique noire connaît un renouveau important dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, alors qu’une nouvelle génération d’intellectuel.le.s proposent d’analyser la fondation et l’évolution de la société nord-américaine comme étant essentiellement basée sur une guerre faite aux peuples noirs (Coates, 2015). Loin de prendre fin avec l’abolition de l’esclavage en 1865 aux États-Unis, cette guerre pour le contrôle de la force de travail de la population noire et en vue d’en détruire le pouvoir social se poursuit depuis, à différentes intensités. Les deux dernières années ont toutefois été marquées par une contre-offensive impressionnante, que l’Amérique n’avait pas vue depuis les années 1960, voire 1860 (Kelley, 2020). Loin d’exprimer un désir d’intégration à la société blanche et capitaliste, la colère noire qui retentit aujourd’hui exige l’abolition de toute violence faite aux Noir.e.s, et plus spécifiquement de la police et de la prison, instruments de ce qu’ils et elles nomment, depuis que Cedric Robinson (2020[1983]) en a popularisé la notion, le « capitalisme racial ».
Si les sociétés nord-américaines estiment avoir fait du progrès dans la lutte contre le racisme, suggère Angela Davis (2003), c’est que celui-ci s’exerce désormais à l’abri des regards, derrière les murs des prisons. Aux États-Unis, au début des années 2010, une personne sur 100 vivait dans une cage (Wilson Gilmore, 2012). Du nombre total de détenus, environ la moitié sont des personnes noires, qui représentent pourtant un peu moins de 15% de la population. La thèse d’un complexe carcéro-industriel, construit sur la base du complexe militaro-industriel et fonctionnant en symbiose avec ce dernier, s’est imposée pour rendre compte de cette hausse fulgurante de l’incarcération, alors que toutes les évidences montrent que la criminalité va pourtant en diminuant. Cette explication permet à certain.e.s d’attirer la faveur de l’opinion publique et de construire la solidarité avec les détenu.e.s autour de l’idée que ces personnes, racisées en grande partie, sont en réalité innocentes, comme l’ont été tant de victimes de violences policières. Or, dans une perspective abolitionniste, cet argument est contre-productif. Il favorise une sympathie toute libérale pour une certaine catégorie de victimes ou de détenu.e.s, ceux et celles qui ne poseraient pas de réelle menace à la société blanche (Wang, 2018). Individualisant l’acte de brutalité subi (ou la criminalisation), une telle stratégie laisse intacts les cadres d’intelligibilité qui ont favorisé depuis des siècles l’adéquation entre la race noire et la culpabilité (Butler, 1993; Dorlin, 2017). Il faut donc y lire un dispositif de désarmement des mouvements de résistance au capitalisme racial et de neutralisation de la colère noire.
Cet atelier propose de réfléchir à l’importance de ces nouvelles « classes dangereuses » pour l’Amérique contemporaine à partir de perspectives politiques, juridico-légales, historiques, socio-anthropologiques, littéraires ou artistiques. Pourront être abordés: l’instrumentalisation de la colère et/ou de la révolte, les rapports qu’entretiennent la résistance noire et la résurgence autochtone, la violence sexiste au cœur du capitalisme carcéral, les figures féminines de la lutte pour l’égalité raciale, la création d’un imaginaire abolitionniste et la littérature carcérale d’hier à aujourd’hui.
A1.3 Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances
19 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle : LAU 3452
Type d’activité : Atelier
Panel 3 : Se défendre : perspectives féministes sur la violence et la carcéralité
De la rue à la révolution : la place de la violence dans les mouvements sociaux progressistes, Camille Cottais
Les militantes féministes et l’abolitionnisme pénal en France, Marie Chapot
« Trauma-to-prison pipeline » : regards féministes et abolitionnistes sur le parcours intime vers la carcéralité, Éléonore Paré
La pensée politique noire connaît un renouveau important dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, alors qu’une nouvelle génération d’intellectuel.le.s proposent d’analyser la fondation et l’évolution de la société nord-américaine comme étant essentiellement basée sur une guerre faite aux peuples noirs (Coates, 2015). Loin de prendre fin avec l’abolition de l’esclavage en 1865 aux États-Unis, cette guerre pour le contrôle de la force de travail de la population noire et en vue d’en détruire le pouvoir social se poursuit depuis, à différentes intensités. Les deux dernières années ont toutefois été marquées par une contre-offensive impressionnante, que l’Amérique n’avait pas vue depuis les années 1960, voire 1860 (Kelley, 2020). Loin d’exprimer un désir d’intégration à la société blanche et capitaliste, la colère noire qui retentit aujourd’hui exige l’abolition de toute violence faite aux Noir.e.s, et plus spécifiquement de la police et de la prison, instruments de ce qu’ils et elles nomment, depuis que Cedric Robinson (2020[1983]) en a popularisé la notion, le « capitalisme racial ».
Si les sociétés nord-américaines estiment avoir fait du progrès dans la lutte contre le racisme, suggère Angela Davis (2003), c’est que celui-ci s’exerce désormais à l’abri des regards, derrière les murs des prisons. Aux États-Unis, au début des années 2010, une personne sur 100 vivait dans une cage (Wilson Gilmore, 2012). Du nombre total de détenus, environ la moitié sont des personnes noires, qui représentent pourtant un peu moins de 15% de la population. La thèse d’un complexe carcéro-industriel, construit sur la base du complexe militaro-industriel et fonctionnant en symbiose avec ce dernier, s’est imposée pour rendre compte de cette hausse fulgurante de l’incarcération, alors que toutes les évidences montrent que la criminalité va pourtant en diminuant. Cette explication permet à certain.e.s d’attirer la faveur de l’opinion publique et de construire la solidarité avec les détenu.e.s autour de l’idée que ces personnes, racisées en grande partie, sont en réalité innocentes, comme l’ont été tant de victimes de violences policières. Or, dans une perspective abolitionniste, cet argument est contre-productif. Il favorise une sympathie toute libérale pour une certaine catégorie de victimes ou de détenu.e.s, ceux et celles qui ne poseraient pas de réelle menace à la société blanche (Wang, 2018). Individualisant l’acte de brutalité subi (ou la criminalisation), une telle stratégie laisse intacts les cadres d’intelligibilité qui ont favorisé depuis des siècles l’adéquation entre la race noire et la culpabilité (Butler, 1993; Dorlin, 2017). Il faut donc y lire un dispositif de désarmement des mouvements de résistance au capitalisme racial et de neutralisation de la colère noire.
Cet atelier propose de réfléchir à l’importance de ces nouvelles « classes dangereuses » pour l’Amérique contemporaine à partir de perspectives politiques, juridico-légales, historiques, socio-anthropologiques, littéraires ou artistiques. Pourront être abordés: l’instrumentalisation de la colère et/ou de la révolte, les rapports qu’entretiennent la résistance noire et la résurgence autochtone, la violence sexiste au cœur du capitalisme carcéral, les figures féminines de la lutte pour l’égalité raciale, la création d’un imaginaire abolitionniste et la littérature carcérale d’hier à aujourd’hui.
A1.4 Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances
19 mai 2023
16h00 – 17h30
Salle : LAU 3452
Type d’activité : Atelier
Comité d’organisation :
Émilie Bernier, Université d’Ottawa
Éléonore Paré, Université d’Ottawa
Dimitri M’bama, Université de Montréal
Panel 4 : Création destructrice
De Bigger Thomas à Sethe (en passant par Rufus Scott) : analyse des représentations de la criminalité dans les œuvres de Richard Wright, James Baldwin et Toni Morrison, Dimitri M’Bama
Détruire avec le Kanién:ke, Philippe Néméh-Nombré
La pensée politique noire connaît un renouveau important dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, alors qu’une nouvelle génération d’intellectuel.le.s proposent d’analyser la fondation et l’évolution de la société nord-américaine comme étant essentiellement basée sur une guerre faite aux peuples noirs (Coates, 2015). Loin de prendre fin avec l’abolition de l’esclavage en 1865 aux États-Unis, cette guerre pour le contrôle de la force de travail de la population noire et en vue d’en détruire le pouvoir social se poursuit depuis, à différentes intensités. Les deux dernières années ont toutefois été marquées par une contre-offensive impressionnante, que l’Amérique n’avait pas vue depuis les années 1960, voire 1860 (Kelley, 2020). Loin d’exprimer un désir d’intégration à la société blanche et capitaliste, la colère noire qui retentit aujourd’hui exige l’abolition de toute violence faite aux Noir.e.s, et plus spécifiquement de la police et de la prison, instruments de ce qu’ils et elles nomment, depuis que Cedric Robinson (2020[1983]) en a popularisé la notion, le « capitalisme racial ».
Si les sociétés nord-américaines estiment avoir fait du progrès dans la lutte contre le racisme, suggère Angela Davis (2003), c’est que celui-ci s’exerce désormais à l’abri des regards, derrière les murs des prisons. Aux États-Unis, au début des années 2010, une personne sur 100 vivait dans une cage (Wilson Gilmore, 2012). Du nombre total de détenus, environ la moitié sont des personnes noires, qui représentent pourtant un peu moins de 15% de la population. La thèse d’un complexe carcéro-industriel, construit sur la base du complexe militaro-industriel et fonctionnant en symbiose avec ce dernier, s’est imposée pour rendre compte de cette hausse fulgurante de l’incarcération, alors que toutes les évidences montrent que la criminalité va pourtant en diminuant. Cette explication permet à certain.e.s d’attirer la faveur de l’opinion publique et de construire la solidarité avec les détenu.e.s autour de l’idée que ces personnes, racisées en grande partie, sont en réalité innocentes, comme l’ont été tant de victimes de violences policières. Or, dans une perspective abolitionniste, cet argument est contre-productif. Il favorise une sympathie toute libérale pour une certaine catégorie de victimes ou de détenu.e.s, ceux et celles qui ne poseraient pas de réelle menace à la société blanche (Wang, 2018). Individualisant l’acte de brutalité subi (ou la criminalisation), une telle stratégie laisse intacts les cadres d’intelligibilité qui ont favorisé depuis des siècles l’adéquation entre la race noire et la culpabilité (Butler, 1993; Dorlin, 2017). Il faut donc y lire un dispositif de désarmement des mouvements de résistance au capitalisme racial et de neutralisation de la colère noire.
Cet atelier propose de réfléchir à l’importance de ces nouvelles « classes dangereuses » pour l’Amérique contemporaine à partir de perspectives politiques, juridico-légales, historiques, socio-anthropologiques, littéraires ou artistiques. Pourront être abordés: l’instrumentalisation de la colère et/ou de la révolte, les rapports qu’entretiennent la résistance noire et la résurgence autochtone, la violence sexiste au cœur du capitalisme carcéral, les figures féminines de la lutte pour l’égalité raciale, la création d’un imaginaire abolitionniste et la littérature carcérale d’hier à aujourd’hui.
A2.1 Négocier en temps de crise
20 mai 2023
9h00 – 10h30
Salle: LAU 3452
Type d’activité: Atelier
Panel 1
Modérateur : Julien Giudicelli, maître de conférences HDR en droit public, Université de Bordeaux, Centre de droit et de politique comparés Jean-Claude Escarras, Centre aquitain d’histoire du droit Institut de recherches Montesquieu
Négociation impossible et crise politique. L’exemple de la réforme des retraites en France, Julien Giudicelli
Les négociations entre l’Etat et les collectivités pendant la crise sanitaire – Réflexions à partir des exemples belge et français, Antoine Ploux
Négocier sous régime polémique : le cas du débat médiatique sur les changements climatiques au Québec, Marouane Joundi
Négocier ou punir ? La gouvernance autoritaire sous les projecteurs, Federico Chaves Correa
La COP 27 vient à peine de s’achever qu’on en tire un bilan médiocre. Selon l’Union européenne il n’y aurait eu aucune avancée dans la lutte contre le réchauffement. Selon d’autres la création d’un fonds d’aide aux pays les plus pauvres serait une amélioration majeure. Rendez-vous est pris l’année prochaine pour l’organisation de la COP 28. En attendant le climat continue de se réchauffer.
Est-ce un exemple d’échec d’une négociation politique ? D’aucuns avanceraient que le fait de se réunir est en soi un succès. Cela fait vingt-sept ans que les Etats se réunissent annuellement pour débattre du réchauffement. On ne saurait dire si cela aurait été pire sans les COP mais il est certain qu’elles n’empêchent pas l’évolution dangereuse du climat.
Les négociations politiques sont censées résoudre ou prévenir un conflit. Des parties se retrouvent avec chacune des exigences préalables souvent opposées. Il faudra trouver un moyen de les concilier à l’issue de débats suivant l’idée que la raison finira toujours par l’emporter. Non pas une raison dans laquelle les débatteurs se soumettent à l’hypothétique évidence d’une improbable Vérité mais un processus de rationalité se mettant en place au fur et à mesure que progresse la négociation, tel que le conçoit Habermas. Les crises seraient ainsi résolues grâce à des débats rationnels.
La réalité semble autre. Lorsque la crise se double d’une urgence absolue (pandémie, terrorisme), la négociation peut être considérée comme un luxe que le manque de temps ne permettrait pas d’offrir. La solution envisagée serait alors de confier le pouvoir à un Exécutif agissant pendant que parallèlement on mettrait en place des négociations dans une recherche de complémentarité entre l’action et la discussion, avec le risque de marquer la différence et même l’opposition entre ces deux modes de gouvernance.
Les conseils de défense sanitaire organisés au plus fort de la pandémie et couverts par définition par le secret témoignent de cette préférence française, au point qu’il est légitime de s’interroger : la France serait-elle devenue schmittienne en ce que le décisionnisme s’opère au détriment d’un dialogue démocratique ? La Constitution de 1958, dans son esprit et sa forme (on renvoie à l’article 16 sur les pouvoirs du Président en temps de crise) incite à ce type de politique, faisant de la Ve République un régime pensé spécialement pour la crise avec, entre les parenthèses d’une accalmie, le recours au parlementarisme.
La négociation politique apparaît ainsi comme l’expression d’une crise en soi qui viendrait en surimpression conduisant à un renversement des valeurs : la gestion en petit comité sous l’autorité du Président semble être la solution la plus efficace et la plus apaisante face au conflit ouvert que révélerait la négociation.
Pourtant nous sommes tous actuellement dans l’attente d’éventuelles négociations visant à résoudre la guerre en Ukraine ou la protection de la biodiversité. Critiques mais avec toujours cet espoir que la rationalité commune l’emportera au profit de l’intérêt général. Espoir réaliste ou fantasmé au-delà duquel reste une seule question : peut-on négocier en temps de crise ?
A2.2 Négocier en temps de crise
20 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle: LAU 3452
Type d’activité: Atelier
Panel 2
Modératrice : Sylvie Schmitt, maître de conférences HDR en droit public, Université de Toulon, Centre de droit et de politique comparés Jean-Claude Escarras
La sollicitude : usages et ambivalence d’un mode de gouvernement des religieux « en crise » dans l’Ordre dominicain (années 1950 – années 1970), Yann Raison du Cleuziou,
La fabrique de la résignation sociale dans les économies financiarisées : le cas français, Jean-Pierre Pichard Stamford,
L’inadéquation du rationalisme français à la négociation, Sylvie Schmitt
La place du droit dans la négociation politique, Shirine Arab
La COP 27 vient à peine de s’achever qu’on en tire un bilan médiocre. Selon l’Union européenne il n’y aurait eu aucune avancée dans la lutte contre le réchauffement. Selon d’autres la création d’un fonds d’aide aux pays les plus pauvres serait une amélioration majeure. Rendez-vous est pris l’année prochaine pour l’organisation de la COP 28. En attendant le climat continue de se réchauffer.
Est-ce un exemple d’échec d’une négociation politique ? D’aucuns avanceraient que le fait de se réunir est en soi un succès. Cela fait vingt-sept ans que les Etats se réunissent annuellement pour débattre du réchauffement. On ne saurait dire si cela aurait été pire sans les COP mais il est certain qu’elles n’empêchent pas l’évolution dangereuse du climat.
Les négociations politiques sont censées résoudre ou prévenir un conflit. Des parties se retrouvent avec chacune des exigences préalables souvent opposées. Il faudra trouver un moyen de les concilier à l’issue de débats suivant l’idée que la raison finira toujours par l’emporter. Non pas une raison dans laquelle les débatteurs se soumettent à l’hypothétique évidence d’une improbable Vérité mais un processus de rationalité se mettant en place au fur et à mesure que progresse la négociation, tel que le conçoit Habermas. Les crises seraient ainsi résolues grâce à des débats rationnels.
La réalité semble autre. Lorsque la crise se double d’une urgence absolue (pandémie, terrorisme), la négociation peut être considérée comme un luxe que le manque de temps ne permettrait pas d’offrir. La solution envisagée serait alors de confier le pouvoir à un Exécutif agissant pendant que parallèlement on mettrait en place des négociations dans une recherche de complémentarité entre l’action et la discussion, avec le risque de marquer la différence et même l’opposition entre ces deux modes de gouvernance.
Les conseils de défense sanitaire organisés au plus fort de la pandémie et couverts par définition par le secret témoignent de cette préférence française, au point qu’il est légitime de s’interroger : la France serait-elle devenue schmittienne en ce que le décisionnisme s’opère au détriment d’un dialogue démocratique ? La Constitution de 1958, dans son esprit et sa forme (on renvoie à l’article 16 sur les pouvoirs du Président en temps de crise) incite à ce type de politique, faisant de la Ve République un régime pensé spécialement pour la crise avec, entre les parenthèses d’une accalmie, le recours au parlementarisme.
La négociation politique apparaît ainsi comme l’expression d’une crise en soi qui viendrait en surimpression conduisant à un renversement des valeurs : la gestion en petit comité sous l’autorité du Président semble être la solution la plus efficace et la plus apaisante face au conflit ouvert que révélerait la négociation.
Pourtant nous sommes tous actuellement dans l’attente d’éventuelles négociations visant à résoudre la guerre en Ukraine ou la protection de la biodiversité. Critiques mais avec toujours cet espoir que la rationalité commune l’emportera au profit de l’intérêt général. Espoir réaliste ou fantasmé au-delà duquel reste une seule question : peut-on négocier en temps de crise ?
A2.3 Négocier en temps de crise
20 mai 2023
16h00 – 17h30
Salle: LAU 3452
Type d’activité: Atelier
Panel 3 :
Modérateur : Julien Giudicelli, maître de conférences HDR en droit public, Université de Bordeaux, Centre de droit et de politique comparés Jean-Claude Escarras, Centre aquitain d’histoire du droit Institut de recherches Montesquieu
États et numérique : l’ère d’une souveraineté négociée, Michaël Bardin
Thierry Dominici
Roberto Louvin
La COP 27 vient à peine de s’achever qu’on en tire un bilan médiocre. Selon l’Union européenne il n’y aurait eu aucune avancée dans la lutte contre le réchauffement. Selon d’autres la création d’un fonds d’aide aux pays les plus pauvres serait une amélioration majeure. Rendez-vous est pris l’année prochaine pour l’organisation de la COP 28. En attendant le climat continue de se réchauffer.
Est-ce un exemple d’échec d’une négociation politique ? D’aucuns avanceraient que le fait de se réunir est en soi un succès. Cela fait vingt-sept ans que les Etats se réunissent annuellement pour débattre du réchauffement. On ne saurait dire si cela aurait été pire sans les COP mais il est certain qu’elles n’empêchent pas l’évolution dangereuse du climat.
Les négociations politiques sont censées résoudre ou prévenir un conflit. Des parties se retrouvent avec chacune des exigences préalables souvent opposées. Il faudra trouver un moyen de les concilier à l’issue de débats suivant l’idée que la raison finira toujours par l’emporter. Non pas une raison dans laquelle les débatteurs se soumettent à l’hypothétique évidence d’une improbable Vérité mais un processus de rationalité se mettant en place au fur et à mesure que progresse la négociation, tel que le conçoit Habermas. Les crises seraient ainsi résolues grâce à des débats rationnels.
La réalité semble autre. Lorsque la crise se double d’une urgence absolue (pandémie, terrorisme), la négociation peut être considérée comme un luxe que le manque de temps ne permettrait pas d’offrir. La solution envisagée serait alors de confier le pouvoir à un Exécutif agissant pendant que parallèlement on mettrait en place des négociations dans une recherche de complémentarité entre l’action et la discussion, avec le risque de marquer la différence et même l’opposition entre ces deux modes de gouvernance.
Les conseils de défense sanitaire organisés au plus fort de la pandémie et couverts par définition par le secret témoignent de cette préférence française, au point qu’il est légitime de s’interroger : la France serait-elle devenue schmittienne en ce que le décisionnisme s’opère au détriment d’un dialogue démocratique ? La Constitution de 1958, dans son esprit et sa forme (on renvoie à l’article 16 sur les pouvoirs du Président en temps de crise) incite à ce type de politique, faisant de la Ve République un régime pensé spécialement pour la crise avec, entre les parenthèses d’une accalmie, le recours au parlementarisme.
La négociation politique apparaît ainsi comme l’expression d’une crise en soi qui viendrait en surimpression conduisant à un renversement des valeurs : la gestion en petit comité sous l’autorité du Président semble être la solution la plus efficace et la plus apaisante face au conflit ouvert que révélerait la négociation.
Pourtant nous sommes tous actuellement dans l’attente d’éventuelles négociations visant à résoudre la guerre en Ukraine ou la protection de la biodiversité. Critiques mais avec toujours cet espoir que la rationalité commune l’emportera au profit de l’intérêt général. Espoir réaliste ou fantasmé au-delà duquel reste une seule question : peut-on négocier en temps de crise ?
A3.1 Négocier sa mobilité : usages et usager∙es des catégories migratoires
20 mai 2023
14h00 – 15h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Table ronde
Juliette Dupont, chercheuse postdoctorale, Université Concordia
Antoine Mazot-Oudin, chercheur postdoctoral, Université Concordia
Panel 1. S’approprier les dispositifs migratoires : entre vulnérabilité et résistance
Discutant : Antoine Mazot-Oudin
Programme de parrainage collectif des réfugié-e-s: Perspectives sur les récents changements apportés au programme au Québec
Clothilde Parent-Chartier, École de développement international Université d’Ottawa
Cette présentation porte sur les plus récents changements administratifs apportés au programme de parrainage collectif des réfugié-e-s au Québec, et plus particulièrement sur les impacts que ces changements ont pu avoir sur les personnes cherchant à participer à celui-ci. Les constats qui seront présentés au cours de la présentation découlent de l’analyse de 35 entrevues individuelles réalisées avec des personnes qui ont été parrainées, des personnes qui parrainent et des professionnel-le-s qui soutiennent des groupes de parrainage. Il sera démontré que l’accès au parrainage est de plus en plus restreint et que le processus de demande est de plus en plus complexe, engendrant pour les personnes et les organisations ce que Herd et Moynihan (2018) appellent des coûts de conformité (compliance cost), des coûts d’apprentissage (learning cost) et des coûts psychologiques (psychological cost). Puisque tous et toutes n’ont pas les mêmes capacités à assumer ces divers coûts, la vocation humanitaire au cœur du programme du parrainage est fragilisée. Parmi les préoccupations qui ont été dégagées dans les entretiens, la présentation se penchera particulièrement sur celles concernant l’accès de plus en plus inégal au programme de parrainage. Il sera démontré, entre autres, que les personnes pouvant être considérées comme étant les plus vulnérables sont celles risquant d’être les plus durement touchées par les récents changements apportés au programme.
Réfugiés « vulnérables » : usages et effets d’une nouvelle catégorie d’action publique
Ahmed Hamila, Département de sociologie, Université de Montréal
Depuis les années 1990, le concept de vulnérabilité connaît un essor en sciences sociales pour penser les processus de précarité et de marginalité de différentes franges de la population (Castel 1994). Plus récemment, les spécialistes en études migratoires se sont saisis de cette catégorie conceptuelle afin d’analyser la gestion des situations des personnes réfugiées (Sozer 2020), ou encore le discours politique sur l’asile et la migration (Leboeuf 2021). Parallèlement, on constate un regain d’intérêt parmi les entrepreneurs politiques qui font davantage référence à cette notion dans le développement des politiques publiques, notamment dans le cadre des politiques de migration et d’asile. Ainsi, d’une catégorie d’analyse scientifique, la notion de vulnérabilité se mue en en catégorie d’action publique, comme en témoigne son utilisation dans les directives européennes sur les conditions d’accueil des demandeurs d’asile (2013/33/UE). Dans le cadre de cette communication, il s’agit de penser les usages et les effets de cette nouvelle catégorie d’action publique. Plus spécifiquement, cette communication va se concentrer les « réfugiés LGBTI » qui ont été catégorisés comme réfugiés dits vulnérables qui requirent des besoins spéciaux dans le cadre du développement du Régime d’asile européen commun (RAEC). Je soutiens que la vulnérabilisation des « réfugiés LGBTI » (au détriment de l’ensemble des réfugiés) permet à l’Union européenne de répondre à deux impératifs antinomiques sans qu’ils soient pensés en tant que tels : protéger les minorités sexuelles (car elles sont considérées comme plus vulnérables) et fermer les frontières extérieures de l’UE au nom de l’intégrité du système d’asile. En effet, en vulnérabilisant certaines catégories de réfugiés et en se montrant par ricochet plus suspicieuse à l’égard de l’ensemble des réfugiés (c’est-à-dire pas nécessairement considérés comme vulnérables), l’UE limite de facto l’accès à son territoire.
Textes et marchés cachés du visa Schengen en Algérie et en Chine : les arts de la dissidence
Juliette Dupont, Département de science politique, Concordia University
Cette communication compare les pratiques, discours et expériences des demandeur∙ses de visa court-séjour à destination de l’Europe de nationalités chinoise et algérienne. Les expériences dont ils∙elles font le récit donnent à voir les pratiques d’appropriation des procédures de visa, que celles-ci soient répressives dans le cas d’Algérie ou incitatives dans le cas de la Chine. Grace au concept de capital spatial, ce papier permet de comprendre comment les demandeur∙ses accumulent et mobilisent plusieurs ressources leur permettant de contourner les obstacles liés à l’obtention d’un visa. Dans les deux cas, il existe des marchés parallèles des visas, industries locales et informelles qui fournissent un ensemble de services de facilitation, parfois dans l’illégalité. Enfin, le papier recueille les paroles de ces usager∙es et les rapports (dé)politisés à la mobilité, et plus largement aux inégalités, que les procédures de visa façonnent chez eux∙elles. En prenant le parti de ces acteur∙rices, cette communication permet ainsi de montrer ce que les individus font de la discrimination qui les vise, et restaure leurs marges de manœuvre face à des procédures souvent perçues comme arbitraires.
A3.2 Négocier sa mobilité : usages et usager∙es des catégories migratoires
20 mai 2023
16h00 – 17h30
Salle : LAU 1435
Type d’activité : Table ronde
Juliette Dupont, chercheuse postdoctorale, Université Concordia
Antoine Mazot-Oudin, chercheur postdoctoral, Université Concordia
Panel 2. Expatrié∙e ou immigré∙e ? Les négociations des statuts et identités en mobilité internationale
Discutante : Juliette Dupont
« Ya no quiero ser extranjero » : les négociations identitaires d’entrepreneurs d’origine européenne à Mexico
Émilie Angrignon-Girouard (département d’anthropologie, Université de Montréal)
Les expatpreneurs sont conceptualisés par la littérature scientifique comme des preneurs de risques privilégiés libres de contraintes du fait de la direction nord-sud de leur mobilité. Or, cette perspective évacue l’ensemble des négociations identitaires en jeu dans leurs parcours migratoires. Plusieurs créateurs de petites entreprises dans un contexte nord-sud sont bien davantage des migrants in the middle aux ressources modérées. En mobilisant une enquête ethnographique réalisée à Mexico, la présentation interroge cette contradiction et se penche sur les négociations identitaires de 26 entrepreneurs européens. S’ils sont associés par leurs pairs mexicains aux représentations nationales historiquement construites des étrangers du premier monde, l’enquête démontre que les négociations issues de leurs interactions quotidiennes visent davantage à diminuer leur association apparente à cette catégorie nationale qu’à en faire usage. Les entrepreneurs tendent à prouver leur capacité à se mexicaniser afin de correspondre à un idéal national de métissage.
« On n’était pas prêt à attendre d’avoir un permis canadien » : Les inégales stratégies migratoires des Français.e.s établi.e.s au Québec.
Antoine Mazot-Oudin, Département de science politique, Concordia University
Depuis le début des années 2000, l’immigration de ressortissants français au Canada et notamment au Québec est en forte croissance. Souvent présentée comme privilégiée, en raison de son recrutement social parmi les classes moyennes et supérieures (Papinot, Le Her et Vilbrod, 2012) et des dispositifs étatiques la privilégiant (Mercier et al., 2022), cette « nouvelle vague » française est cependant plus rarement envisagée au regard des petites différences de positions sociales et raciales qui séparent les immigrant.e.s français.e.s entre eux. Parallèlement, la progression d’une « immigration probatoire » au Canada ces dernières années (Ellerman et Gorokhovskaia, 2019) – marquée par la multiplication des statuts migratoires, notamment temporaires, et des voies d’accès à la résidence permanente – a accentué la complexité des processus administratifs d’obtention de statuts permanents.
En recueillant les trajectoires migratoires d’un panel de Français.e.s établi.e.s au Québec (N=55) aux statuts et aux positions sociales diversifiés, cette communication vise à étudier les inégales ressources (personnelles, professionnelles, sociales) que mobilisent ces immigrant.e.s dans leur parcours administratifs d’immigration. Les usages stratégiques (et parfois les mésusages) que font ces Français.e.s des catégories migratoires qui leur sont offertes dans leur recherche d’obtention de statuts permanents gagnent à être analysés en les rattachant aux propriétés sociale des agent.e.s. Cette contribution à une sociologie des usages des processus migratoires par les usagers eux-mêmes soulignent ainsi des inégalités qui nous informent par la bande sur les rapports ordinaires à l’État de ces participant.e.s.
Revendiquer le droit au travail. Imaginaires sociaux et politiques des demandeurs d’asile mexicains au Canada (2022 – 2023)
Emma Le Lain, Département de sociologie, UQAM
Depuis 2022, les demandeurs d’asile mexicains arrivent à Montréal « avec un objectif principal : trouver du travail au Québec ». Cette revendication du droit au travail par le biais de la demande d’asile (Verea, 2010) témoigne d’un décalage entre les imaginaires sociaux des demandeurs d’asile mexicains, et l’imaginaire politique contenu dans la définition du statut de réfugié selon la Convention de Genève et le Protocole de New York (Molina, 2007).
Au Canada, le taux d’acceptation des demandeurs d’asile mexicains est passé de 33% en 2017 à 49% en 2022 (CISR, 2023). Les demandeurs d’asile et les réfugiés sont par ailleurs surreprésentés dans les secteurs d’activité dits « essentiels » (Salamanca Cardona, 2019). Ce phénomène souligne la désuétude de la séparation dichotomique entre migration de travail et exil politique en contexte de capitalisme avancé (Lochak, 2013 ; Pécoud, 2017).
Comment les demandes d’asile des Mexicains à Montréal en 2022 témoignent-elles d’une évolution des imaginaires sociaux et politiques liés à la définition du statut de réfugié ? Préalable au terrain de recherche, cette communication vise à présenter les résultats préliminaires et hypothèses issus de notre revue de littérature.
Table ronde conférenciers d’honneur et Cocktail dînatoire
Table Ronde, Cocktail dînatoire et Remise des prix
TABLE RONDE
17h-20h : Cocktail dînatoire
17h45: Mot de président
18h-19h : Table Ronde
19h-19h30 : Remise des prix
La Négociation Politique : Un Art En Perte de Vitesse ?
19 mai 2023,
À parti de 17h00
Salle : Atrium DKN
Modératrice :
Laurence Bherer, professeure titulaire au département de science politique de l’Université de Montréal
Conférencier.e.s d’honneur :
Yves Montigny, Assemblée nationale du Québec
François Blais, professeur au département de science politique de l’Université Laval
La négociation est un processus dans lequel deux ou plusieurs parties communiquent des demandes et des propositions dans le but de parvenir à une décision commune acceptable pour tous. La notion de négociation est loin d’être étrangère à la science politique. Elle est une partie intégrante et incontournable de plusieurs champs de la discipline. Que ce soit pour parvenir à un accord international, pour établir les règles de la joute parlementaire, pour modifier la constitution d’un pays ou pour la mise à l’agenda d’un enjeu par un groupe de la société civile, la négociation est au cœur de toute activité politique. Or, avec la montée des mouvements populistes, les divisions partisanes croissantes et la remise en cause des institutions internationales, tout laisse croire que la négociation politique est en perte de vitesse. De nombreux dirigeants gouvernent par décrets aux moindres signes de crises, la méfiance citoyenne face aux élus s’accentue et une carence en solidarité internationale donne lieu à des crises climatiques, migratoires, sécuritaires et financières qui paraissent insolubles. Cette grande difficulté à se fier aux institutions pour trouver une solution collective est-elle un signe d’une ère nouvelle, où la négociation devient graduellement un art désuet, ou est-elle une phase passagère qui marquera à moyen ou à long terme un retour vers une convergence acceptable des diverses solutions politiques face à d’importantes crises communes ?
De plus, la littérature concernant la négociation en science politique tend à prendre quelques formes distinctes, soit les études de cas, les études statistiques, les études théoriques et les modèles de théorie des jeux. Toutefois, encore peu d’études s’attaquent à la question de négociation en faisant cohabiter ou même en confrontant ces diverses approches.
En cette période où les positions politiques sont polarisées et polarisantes, la négociation demeure toutefois un élément central de l’activité politique. L’apport des politologues à la compréhension est non seulement nécessaire, mais elle relève également d’un certain sentiment d’urgence.
Biographies :
Laurence Bherer
Laurence Bherer est professeure titulaire au département de science politique de l’Université de Montréal. Ses recherches portent sur la participation publique, la démocratie locale et l’engagement politique. Ses publications récentes comprennent : « L’engagement pousse là où on le sème : Le Carré Casgrain, de jardin ouvert à collectif citoyen » (Édition Écosociété, avec Françoise Montambeault et Geneviève Cloutier), « The politics of the third-actors : strategies used by public participation professionals in their interactions with public forum sponsors » (dans la revue Local government studies, 2023).
Yves Montigny
Natif de Baie-Comeau, Yves Montigny porte à son actif un grand nombre d’implications sociales et communautaires. Il a œuvré à tour de rôle durant une vingtaine d’années comme enseignant au secondaire, conseiller pédagogique, président d’un syndicat et d’une fondation.
Ayant porté les titres de conseiller municipal en 2016 et 2017 et de maire de Baie-Comeau de 2017 à 2022, il s’est impliqué au sein de multiples commissions et comités tant à l’Union des municipalités du Québec qu’à la Fédération québécoise des municipalités, notamment au comité des aéroports régionaux et comme président du comité sur la forêt de l’UMQ.
Yves est un homme rassembleur, impliqué et disponible qui croit fermement au développement social, communautaire et économique des régions du Québec.
François Blais
François Blais est professeur au département de science politique de l’Université Laval depuis 1992. Il y enseigne l’histoire des idées politiques et la philosophie politique. De 2006 à 2014, il a été doyen de la Faculté des sciences sociales de cette université. Il a ensuite siégé à l’Assemblée nationale à titre de député de Charlesbourg et de ministre du gouvernement du Québec où il a occupé différents portefeuilles. Il est l’auteur de « Un revenu garanti pour tous : Introduction aux principes de l’allocation universelle », ouvrage qui lui a valu en 2001 le prix du meilleur livre publié au Canada sur les politiques publiques, prix remis par les trois grands organismes subventionnaires de recherche au pays. Ces dernières années, ses travaux ont principalement porté sur les théories contemporaines de la démocratie.
Cocktail dînatoire et Remise des prix
Prix d’excellence – Guy Laforest (Université Laval)
Guy Laforest a été formé à l’Université d’Ottawa, à Laval, à McGill et à l’Université de Calgary où il fut chargé de cours à temps complet et chercheur postdoctoral., Guy Laforest a fait sa carrière en science politique à l’Université Laval comme professeur et chercheur de 1988 à 2017 et à l’École nationale d’administration publique comme directeur général et chercheur de 2017 à 2022. À la retraite, il demeure membre du Groupe de recherche sur les sociétés plurinationales (GRSP) et du Centre de recherche interdisciplinaire sur la diversité et la démocratie (CRIDAQ). Devenu membre de la Société royale du Canada en 2014, ses contributions à l’enseignement, à la recherche et à l’organisation de la vie institutionnelle en science politique sont à classer dans cinq catégories: l’interprétation critique du fédéralisme et de l’État au Canada; l’histoire philosophique du politique et l’histoire intellectuelle au Québec et au Canada; la compréhension des trajectoires politico-intellectuelles de P.E. Trudeau et de Charles Taylor; en pensée politique les apports à l’école canado-québécoise du pluralisme et de la diversité; finalement, les engagements multiples dans les institutions de la vie académique et intellectuelle dans les sciences humaines et notamment la science politique.
Prix d’enseignement – Charles-Philippe David (UQÀM)
Charles-Philippe David Charles-Philippe David est détenteur d’un doctorat en science politique de l’Université Princeton. Il est professeur de sciences politiques à l’Université du Québec à Montréal, président de l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’UQAM, et cofondateur du forum St-Laurent sur la sécurité internationale (UQAM, UdM, Laval). Il a été récipiendaire, en 2012, du prix Vanier-McLaughlin, remis annuellement par le collège militaire canadien à un chercheur qui s’est particulièrement distingué dans le domaine de la stratégie et de la sécurité. Il est membre de l’Académie des lettres et des sciences de la Société Royale du Canada et récipiendaire du prix Jean Finot de l’Institut de France. Il est le seul récipiendaire canadien qui a obtenu la bourse Fulbright à trois reprises, d’abord à l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), puis à l’Université Duke, enfin à l’Université Norwich. Il a été chercheur invité au Woodrow Wilson International Center for Scholars, et professeur invité aux Universités de Montréal et Laval, à Duke, à UCLA et à l’Université du Vermont (Burlington), ainsi qu’à Paris II, Lyon III, Montpellier III, Grenoble, Lille et Nice. De 1985 à 1995, il a été professeur d’études stratégiques au Collège militaire royal de Saint-Jean sur Richelieu. En 1996 il a fondé la Chaire Raoul-Dandurand puis en a été pendant vingt ans, jusqu’en 2016, son premier titulaire. Il a aussi fondé l’Observatoire sur les États-Unis en 2002 et en a été son premier directeur jusqu’en 2012. Il a été le premier détenteur en 2017 de la chaire en Peace Studies de l’université catholique de Lille. Il a écrit seul et en collaboration trois ouvrages publiés par Les Presses de Sciences Po à Paris : La guerre et la paix. Approches et enjeux de la sécurité et de la stratégie (4e édition, 2020), La politique étrangère des États-Unis : fondements, acteurs, formulation(4e édition, 2022), et Au sein de la Maison-Blanche : la formulation (imprévisible) de la politique extérieure des États-Unis de Truman à Obama (3e édition, 2015). Il a aussi codirigé et publié aux Presses de l’Université de Montréal le collectif Théories de la politique étrangère américaine. Auteurs, concepts et approches (2e édition, 2018). Il est enfin l’auteur de L’effet Trump. Quel impact sur la politique étrangère des États-Unis ?, aux Presses de l’Université de Montréal, et le coauteur de Comment Trump a-t-il changé le monde ? Le recul des relations internationales, aux éditions du CNRS (avec Élisabeth Vallet), tous deux publiés en 2020. Il a enfin participé à de nombreuses publications en anglais, sur la stratégie militaire et la prise de décision en politique étrangère américaine, dont la dernière en 2020 a porté sur les « entrepreneurs » décisionnels (McGill/Queens).
Prix Léon-Dion – Emmanuel Choquette « Humour et vivre ensemble : stéréotypes identitaires au sein des groupes minoritaire et majoritaire québécois », 40, 2
L’article d’Emmanuel Choquette examine les relations entre l’humour et les enjeux liés au vivre-ensemble au Québec. Il décrit la manière dont les humoristes traitent du vivre-ensemble en examinant, entre autres choses, les groupes d’individus faisant l’objet de blagues, les stéréotypes utilisés par les humoristes et si les individus ciblés et les stéréotypes évoqués varient en fonction du fait qu’un humoriste fasse partie ou non du groupe majoritaire. À travers le codage de plus de 75 vidéos (publiées entre 2006 et 2018), l’auteur conclut notamment que le stéréotype liant islam et terrorisme fait fréquemment surface et que la communauté arabo-musulmane est souvent l’objet de blagues de l’ensemble des humoristes peu importe s’ils font partie du groupe majoritaire ou non.
Le comité est d’avis que l’article contribue à défricher un champ en effervescence (ici, humour et politique) et que les implications de l’étude sont importantes pour la société québécoise. L’humour est très présent dans la vie politique, mais en tant que politologues nous en savons très peu. Cet article est original, ses méthodes de recherche sont pertinentes et très bien menées. Il améliore notre compréhension des implications de l’humour sur des considérations politiques au Québec et inspirera certainement d’autres chercheur-se à s’intéresser à cet objet d’étude.
Prix Jenson-Pétry et Bélanger-Andrew
Prix Jenson-Pétry pour le meilleur mémoire:
Isabelle Le Bourdais (Département de science politique, UQAM)
« La critique de l’aliénation dans l’École de Francfort : l’importance de Nietzsche et Heidegger comme altérité discursive »
Prix Bélanger-Andrew pour la meilleure thèse de doctorat:
Juliette Dupont (Université de Montréal)
« Verrou ou vitrine ? Politiques du visa Schengen en Algérie et en Chine »
Mention spéciale à Priscyll Anctil Avoine (UQAM) pour l’originalité et la qualité de son étude de terrain.
Assemblée générale annuelle 2023
Assemblée générale annuelle 2023
Assemblée générale annuelle 2023
20 mai 2023
12h00 – 14h00
Salle : 90
Table de matière – Programme 60e Congrès
Table de matière – Programme 60e Congrès
19 mai 2023
8h – 8h45, LAU 3452, Bienvenue
8h45 – 8h55, LAU 3452, Mot de bienvenue du Président Érick Duchesne
9h00 – 10h30, LAU 1435, P1 : Les transformations de l’action publique et de l’administration publique
9h00 – 10h30, LAU 3452, A1.1 : Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances (Panel 1 : L’urgence de l’abolitionnisme. Ce que l’abolitionnisme pénal doit à la pensée radicale noire)
9h00 – 10h30, LAU 1415, *P2 : Gestion des contentieux territoriaux/frontaliers en Afrique centrale : Entre retour à la négociation et recours à la justice internationale
10h30 – 11h, Pause-café matin (LAU 3452)
11h00 – 12h30, LAU 1435, TB 1 : Mémoires politiques : l’auteur-participant- observateur rencontre la critique. Une table ronde
11h00 – 12h30, LAU 1415, P3 : Démocratie et contestation : nouvelles perspectives normatives en théorie politique
11h00 – 12h30, LAU 3452, A1.2 : Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances (Panel 2 : Racisme structurel et violences policières : la démocratie libérale et ses appareils de contrainte)
12h30 – 14h, PAUSE LUNCH – Dîner libre
14h00 – 15h30, LAU 1435, TB 2 : Justice climatique : enjeux et défis
14h00 – 15h30, LAU 1415, *P4 : Gestion concertée des flux migratoires Afrique-Europe: Contours des négociations politiques et des accords conclus depuis 2000
14h00 – 15h30, LAU 3452, A1.3 : Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances (Panel 3 : Se défendre : perspectives féministes sur la violence et la carcéralité)
15h30 – 16h, Pause-café après-midi (LAU 3452)
16h00 – 17h30, LAU 3452, A1.4 : Abolitionnisme pénal, racisme anti-Noir et résistances (Panel 4 : Création destructrice)
16h00 – 17h30, LAU 1415, *P5 : Les accords politiques et « non politiques » et la crise anglophone depuis 1961
17h00-20h00, Atrium DKN, Table ronde La négociation politique : un art en perte de vitesse ?,
17h45: Mot de président
18h-19h : Table Ronde
19h-19h30 : Remise des prix
20 mai 2023
9h00 – 10h30, LAU 1435, P6 L’influence extérieure en contexte de crise
9h00 – 10h30, LAU 3452, A2.1 : Négocier en temps de crise (panel 1)
9h00 – 10h30, LAU 1415, *P7: L’encadrement juridique de la négociation politique, gage d’amélioration et de consolidation de l’art.
10h30 – 11h, Pause-café matin (LAU 3452)
11h00 – 12h30, LAU 3452, P8 : Le Québec en mouvement: nationalisme, souveraineté et enjeux électoraux
11h00 – 12h30, LAU 1435, *P9: Accords politiques et variabilite conflictuelle en Republique Centrafricaine: Quelles perspectives pour la paix ?
11h00 – 12h30, LAU 1415, *P10 : La régionalisation avancée comme alternative aux accords politiques: Cas du Sahara marocain
12hoo – 14h00, Salle LAU 1320, Assemblée générale annuelle 2023
12h30 – 14h, PAUSE LUNCH – Dîner libre
14h00 – 15h30, LAU 1415, P11 : L’action collective face à l’État : entre crise et mobilisation
14h00 – 15h30, LAU 3452, A2.2 : Négocier en temps de crise (panel 2)
14h00 – 15h30, LAU 1435, A3.1 : Négocier sa mobilité : usages et usager·es des catégories migratoires (panel 1 : S’approprier les dispositifs migratoires : entre vulnérabilité et résistance)
15h30 – 16h, Pause-café après-midi (LAU 3452)
16h00 – 17h30, LAU 1415, P12 : Le Canada et le Québec face à la concurrence entre grandes puissances
16h00 – 17h30, LAU 3452, A2.3 : Négocier en temps de crise (panel 3)
16h00 – 17h30, LAU 1435, A3.2 : Négocier sa mobilité : usages et usager·es des catégories migratoires (panel 2 : Expatrié·e ou immigré·e ? Les négociations des statuts et identités en mobilité internationale)
*Panélistes uniquement en ligne